Episode Transcript
[00:00:01] Speaker A: Moi, il n'y a rien qui me rend plus heureuse que la pédagogie, que d'enseigner. Je trouve ça extraordinaire, ça m'a toujours intéressée. Ma maman est enseignante aussi, j'ai été à la bonne école, c'est une super prof.
Et c'est une façon d'enrichir les gens qui est sous-coûtée. C'est quand même l'acquisition de compétences. Quand on t'offre d'acquérir des compétences, c'est souvent, tu es dans une boîte ou quelque part, on te dit, il va falloir vous former, je vais vous renseigner sur ce nouveau truc, etc. Mais c'est génial. On te permet de devenir plus intelligent, de faire de la gym à ton cerveau.
[00:00:48] Speaker B: Aujourd'hui dans Elles font l'espace, je reçois Laura-Andrée Boyer. Avec elle, on parle du plaisir d'enseigner, on parle d'entraînement des astronautes, on parle de vol parabolique, on parle beaucoup, beaucoup d'impesanteur et même un peu de mayonnaise.
Bonjour Laura.
[00:01:03] Speaker A: Bonjour Gilles.
[00:01:05] Speaker B: On va se tutoyer ?
[00:01:06] Speaker A: Oui.
[00:01:07] Speaker B: Ça ne dérange pas ?
[00:01:08] Speaker A: Non, ce serait bizarre de faire autrement, je pense.
[00:01:10] Speaker B: Ouais, on se connaît depuis...
[00:01:14] Speaker A: Tu te souviens quand est-ce qu'on s'est réunis ?
[00:01:17] Speaker B: 2009. Ah tu te souviens de l'année 2009, ouais t'as raison.
[00:01:20] Speaker A: Ah bah l'année ça va, la décennie... Mais tu te souviens de la circonstance ou pas ? On préparait l'ITC Light, t'étais assise à côté je crois, à ma gauche.
[00:01:31] Speaker B: Et ITC Light, parce que le spatial c'est l'univers des acronymes ?
[00:01:36] Speaker A: C'est le Instructor Training Course, Light. D'ailleurs, ça ne s'écrit pas comme Light allégé, c'est écrit LITE. LITE, c'est plus branché, je pense. C'était pour préparer le basic training de la promo des astronautes de 2009. Celle de Thomas Pesquet, Alexander Geyer. Voilà, Samantha Cristoforetti, Andy Mogensen et Tim Peake. Et donc voilà, je crois, alors je ne sais pas si ma mémoire me joue le détour, mais je crois que tu étais assis à ma gauche. Ça avait duré un certain temps, cette histoire de training, c'était assez intense.
[00:02:10] Speaker B: En fait, on apprenait à apprendre, on apprenait à donner des cours à des astronautes.
[00:02:14] Speaker A: On apprenait la pédagogie avec les standards pédagogiques de l'Agence Spatiale Européenne. Et puis voilà comment transmettre des compétences plutôt théoriques sur l'entraînement de base, le basic training.
Et c'était super intense, super intéressant. Et moi, ce qui m'a le plus marquée, c'est que pendant ces deux semaines, je crois, tu ne m'avais jamais parlé en français et j'ai découvert le dernier jour que tu étais français. C'est vrai ? Je te jure, c'est vrai. Tu parlais un anglais impeccable, un allemand époustouflant. Je me suis dit « je ne comprends pas d'où il vient ce gars ». Et le dernier jour, tu m'as parlé en français et j'étais très surprise.
[00:02:53] Speaker B: Donc, voilà.
Ouais, c'était un groupe très hétérogène d'experts d'un petit peu partout et on apprenait à comment construire une leçon pour un astronaute, pour une astronaute.
[00:03:07] Speaker A: C'était quoi ta leçon, toi, déjà ?
[00:03:09] Speaker B: Moi, c'était la communication. Donc moi, j'étais communicant pour les astronautes et c'était leur apprendre comment communiquer, à la fois utiliser les procédures de communication qu'on avait pour les demandes de médias, etc., mais aussi leur apprendre les bons réflexes, les pièges, les choses comme ça.
[00:03:26] Speaker A: Tu l'as redonné plus tard, cette leçon ?
[00:03:28] Speaker B: Oui, parce qu'on m'a demandé de le faire pour la sélection d'après, pour la promotion 2022. Donc j'ai réutilisé des bouts de cette leçon pour ça évidemment, j'ai recyclé. Mais toi t'es devenue carrément instructrice d'astronaute par la suite.
[00:03:45] Speaker A: Oui, alors à l'époque de cette ITC Light, moi je travaillais au CNES à Toulouse, plus précisément au CADMOS, au Centre d'Aide au Développement des Expériences en Micropesanteur.
J'ai oublié un mot, il manque le mot physiologie. Donc j'étais manager d'expérience en physiologie qui se faisait sur les astronautes à bord de l'ISS. C'était mon premier job et c'était extra. Et en parallèle de de ce travail de gestion de projet un peu plus, il y avait des opérations spatiales en temps réel, donc voilà, être en console. Donc j'ai débuté là-bas, au cas de mots, s'embaucher par le MEDES, l'Institut de Médecine Spatiale. Et puis, il y a eu cette fameuse sélection où l'ESA va furter un petit peu auprès des États membres pour que ceux-ci leur fournissent des experts.
Donc, toi, tu étais experte en communication, et moi, j'avais été envoyée pour donner des cours en anatomie et physiologie.
Donc, voilà, c'était super intéressant. C'est un gros investissement aussi en termes de temps parce que c'est une leçon, a priori, que tu ne vas pas donner tous les six mois ou tous les mois ou même tous les ans. Donc, ça peut être frustrant, mais moi, je me suis vraiment éclatée en donnant ce cours-là. C'était vraiment chouette.
[00:05:12] Speaker B: Moi, j'avais compté 120 heures de préparation pour une heure de cours. Mais bon, c'est quand tu fais vraiment, quand tu pars de zéro. Moi, je partais de zéro.
[00:05:20] Speaker A: Oui, mais c'est aussi des standards de dingue.
Il faut vraiment être à corps. Tu te souviens, nos inspecteurs, on peut donner leur nom ou pas ? Dimitri. Dimitri et Stéphane, ils étaient vraiment hyper pointus, féroces. Moi, je me souviens, une fois, j'avais pleuré.
[00:05:39] Speaker B: T'avais pleuré ?
[00:05:39] Speaker A: Je te jure, j'avais pleuré tellement la critique était...
nécessaire. Je me suis dit, mais je suis nulle. C'est incroyable comment je suis nulle. Et j'ai demandé à mon employeur, j'ai dit, là, j'ai besoin de me poser pendant cinq jours, de faire plus que ça. Et donc, ils m'ont donné ce temps-là et j'ai fait une leçon, moi, que j'ai adoré. Je l'ai vraiment adoré. Elle était ludique parce que tu te souviens, il fallait qu'on soit ludique, qu'on soit un peu marrant. qu'on ait des phases de relance, etc. C'était un vrai apprentissage.
[00:06:14] Speaker B: C'était un tête-eau pédagogique qu'il fallait donner avant l'heure. Parce que l'idée c'était que...
Il fallait être parfait parce que les astronautes sont là une heure.
[00:06:26] Speaker A: Ils sont parfaits eux-mêmes.
[00:06:28] Speaker B: Déjà, il y avait un petit peu ce culte, mais ça, ça a un petit peu changé. Mais ils sont là pendant une heure. Des fois, ils viennent de très très loin et la leçon, elle se refera pas. Donc, ce qu'on leur apprend là, ce qu'on leur enseigne là, on pourra pas leur... C'est un one-shot. Si on n'est pas très bon, si on est un peu brouillon, si on n'arrive pas à capter leur attention, c'est mort.
[00:06:53] Speaker A: Voilà, ça c'est devenu mon quotidien. Pour la petite histoire, j'ai donné ce cours, on était évalués. Je crois que mes évaluations avaient dû être pas trop mauvaises et j'avais été contactée après coup par l'ESA et puis par Lufthansa Aviation Training, qui est une des entreprises qui fait partie du consortium des instructeurs.
parce que tous les instructeurs à l'EAC ont fait partie, en fait, d'un groupe, un consortium de plusieurs entreprises, toujours pour ce fameux retour géographique des États membres qui investissent, etc. Il faut qu'ils s'y retrouvent en termes de contrat. Et il m'avait dit « bon voilà, on est intéressé par votre profil, est-ce que vous voulez faire une candidature ? On va sélectionner, je ne sais plus si c'était un ou deux, c'était d'abord un instructeur et puis un second, quelques mois ou six mois après. » et j'avais décidé de me lancer là-dedans parce que, pour plusieurs raisons, j'aimais beaucoup l'EAC, j'y venais régulièrement. L'EAC, c'est ? Le Centre Européen des Astronautes, et non pas le Centre des Astronautes Européens. Donc, le Centre Européen des Astronautes, qui est un des centres de l'Agence Spatiale Européenne. Ce centre est basé à Cologne, sur le campus du DLR, qui est l'Agence Spatiale et d'Aviation Allemande.
Ce centre a été construit à Cologne, notamment pour la gastronomie et la météo clémente. Pas vraiment. Mais pour la proximité avec l'aéroport commercial et militaire, ce qui nous donnait l'opportunité de faire ce qu'on fait maintenant, du direct return.
rapatrier nos astronautes avec un jet qu'on puisse faire atterrir sur l'aéroport militaire et passer le petit portail qui nous amène dans nos locaux.
[00:08:49] Speaker B: Et donc toi, on te propose de changer de vie. Tu étais à Toulouse.
[00:08:52] Speaker A: J'étais à Toulouse, je m'éclatais, j'étais dans une équipe extra. Vraiment, je leur passe tous le bonjour et je leur dis à tous que je les adore.
[00:09:01] Speaker B: Et on te propose de changer de vie pour aller à Cologne en Allemagne, au Centre des astronautes européens, au Centre européen des astronautes, pour donner des cours aux astronautes finalement.
[00:09:11] Speaker A: C'est ça, donc pour devenir formatrice d'astronautes, d'astronautes qui vont se rendre à bord de la Station Spatiale Internationale et contribuer. A priori, on savait déjà que c'était pour tout ce qui était charge utile, payload, parce que Tout à l'heure, on parlait de l'entraînement de base. Il y a une chronologie, il y a une succession d'entraînements chez nos astronautes institutionnels, professionnels. Une fois qu'ils sont sélectionnés, ils ne sont pas encore astronautes, ils sont candidats astronautes pendant 18 mois à deux ans, qui est la durée de cet entraînement de base, qui est une homogénéisation des compétences et des connaissances. Ceux qui ne sont pas pilotes vont le devenir. Ceux qui ne parlent pas encore russe, les gros nuls, ils vont devoir apprendre le russe, l'anatomie, la physique de vie. À l'issue de cet entraînement de base, s'ils réussissent, s'ils ou elles réussissent. Il y a aussi un gros entraînement physique. Ils vont devenir astronautes, bien qu'ils ne soient encore jamais partis dans l'espace, et ils vont commencer la deuxième phase de leur entraînement, qui est l'entraînement spécialiste, qui est un entraînement dédié plus à la formation des systèmes, de la station, donc toute la plomberie, l'électricité, etc. La formation aux procédures d'urgence, Et ça, c'est un entraînement à durée indéterminée. Donc, on a une équipe à l'EAC qui travaille sur ces systèmes, ces procédures d'urgence en cas de feu, de dépressurisation, d'atmosphère toxique, etc. Et moi, je m'orientais toujours, a priori, on le savait dès le début, vers l'entraînement mission, la phase ultime de l'entraînement où on entraîne les astronautes au travail qu'ils ou elles vont faire à bord de la station.
[00:10:49] Speaker B: Et le travail, à proprement parler, c'est non seulement la maintenance quand même de ces systèmes dont tu as parlé, mais c'est surtout le corps du travail, c'est faire des expériences scientifiques, mettre en œuvre des expériences scientifiques.
[00:11:04] Speaker A: C'est ça, c'est l'utilisation de l'ISS. On est arrivé dans la phase d'utilisation de l'ISS, parce qu'à un moment il a fallu la construire, la sécuriser, la maintenir, etc. Faire en sorte que les choses soient plus fluides, moins coûteuses en termes de cargo, etc. Donc elle est bien équipée et maintenant il faut l'utiliser à fond. Et pour l'utiliser, on fait des expériences, on fait des démonstrations technologiques, on fait progresser la science avec les astronautes qui viennent opérer ces charges utiles.
sur leurs collègues, sur eux-mêmes ou alors en tant que tel.
[00:11:36] Speaker B: Ça a été un choix difficile pour toi de quitter justement ta vie à Toulouse et de venir à Cologne, faire quelque chose de complètement différent, dont tu avais en plus un aperçu. Tu savais que c'était exigeant, tu savais que c'était dur un petit peu. Tu as parlé de ça tout à l'heure.
[00:11:55] Speaker A: À l'époque où je travaillais au CADMOS à Toulouse, je me rendais régulièrement à l'EAC parce que c'était le début de Columbus, Columbus qui est la contribution européenne à la Station Spatiale Internationale, c'est un laboratoire d'expérience scientifique où les États membres qui cotisent au vol spatio-habité ont des charges utiles.
Et je me rendais à l'EAC pour soutenir certains instructeurs qui étaient déjà en poste à l'époque, les anciens. Et j'adorais l'ambiance, j'étais fascinée, c'était super.
Donc voilà, j'avais une vision un peu bulle, mais je voyais l'exigence du truc et ça m'attirait parce que j'avais de l'énergie et puis les gens étaient super sympas.
Donc voilà, effectivement, la vie toulousaine me plaisait énormément.
Mon travail au CADMOS me plaisait énormément aussi. Mais pour tout te dire, ce qui a vraiment motivé cette candidature à la sélection d'instructeur, c'est ces deux cœurs, en fait. Je voulais me rapprocher d'une personne qui habitait à Francfort à l'époque.
Et c'est vraiment ça la vraie motivation. C'est un peu nul, si Dieu veut. Mais en fait, c'est ça les motivations.
[00:13:07] Speaker B: Ce sont des choses... Ça correspondait à ce moment-là à tes choix de vie personnelle aussi.
[00:13:12] Speaker A: C'était tout à fait ça. C'était une motivation personnelle, non professionnelle.
qui m'a vraiment stimulée et motivée. Et en plus de ça, il y avait tout le cadre, les gens que je connaissais déjà, l'industrie, cette progression du national vers l'européen, en fin de compte, vers l'ESA. Donc, voilà, tout s'organisait dans la même direction. Mais pour te dire la réalité des choses, la motivation, elle a d'abord été personnelle.
[00:13:38] Speaker B: Et donc, tu te retrouves en 2010.
[00:13:41] Speaker A: Tout début 2010.
[00:13:42] Speaker B: À Cologne, en Allemagne. Tu ne parles pas la langue.
[00:13:46] Speaker A: Je chante un peu l'allemand à l'époque. Tu chantes l'allemand ? Oui, parce que j'ai fait allemand LV2.
Et Big Up à Frau Ramos, ma prof d'allemand portugaise à mon lycée Hector Berlioz. Elle m'a appris... Qui t'a donné les bases ? De la chanson, oui.
[00:14:02] Speaker B: De la chanson allemande.
[00:14:03] Speaker A: C'est tout. D'accord.
[00:14:04] Speaker B: Donc t'arrives avec ta petite base de chanson allemande.
à Cologne, dans un environnement qui est, comme tu le dis, européen, très international. Moi, à l'époque, j'étais aussi, c'était un environnement vraiment très stimulant parce que je me rappelle de cette nouvelle sélection, cette nouvelle classe d'astronautes qui vient d'arriver, qui a ses exigences, son envie d'apprendre, et puis ses rêves aussi de vol spatial, finalement, et tout le monde mobiliser un petit peu pour ça, et tu fais partie de cette cohorte finalement de gens qui va s'affairer pour leur donner ce qu'il faut. Mais tu vas aussi devenir l'instructrice d'astronautes internationaux, non européens.
[00:14:41] Speaker A: Alors effectivement, à l'EAC, on entraîne les astronautes européens, mais on entraîne aussi tous les astronautes qui vont se rendre à bord de la Station Spatiale Internationale, de la NASA.
les cosmonautes russes de Roscosmos, les astronautes japonais de la JAXA, les astronautes canadiens du CSA. Et puis, on a aussi eu ça et là des touristes qui partaient en Soyouz, qu'on a formés aussi. Alors, pourquoi on forme des touristes ? Tout simplement parce qu'ils vont aller vivre à l'intérieur d'une structure qui est sensible, qui s'appelle la Station Spatiale Internationale. Il ne faut pas qu'ils fassent n'importe quoi, donc c'est hyper important. Et puis, un peu plus récemment, les équipages commerciaux d'Axiom, qu'on a formé aussi. On ne forme pas, en tout cas pas encore, les équipages qui sont dehors de ce programme ISS et qui vont faire des vols en autonomie, des vols commerciaux en autonomie.
[00:15:35] Speaker B: Les vols, excuse-moi, les touristes, comme tu dis, ceux qui ne sont pas des astronautes professionnels, en tout cas, et qui volent sur la Station Spatiale Internationale. Qu'est-ce qu'il faut leur apprendre, finalement, puisqu'ils.
[00:15:46] Speaker A: Ne font pas vraiment de vols ? Alors, il y a toute une espèce d'éventail de distinction entre touristes et astronautes professionnels. En fait, on a eu des choses entre deux. On a eu des astronautes de réserve professionnelle, on a eu aussi des astronautes des Émirats Arabes Unis, par exemple, ou d'Arabie Saoudite, qui eux, sont professionnels, mais ne font pas partie, en fait, d'une agence ou des USOS. Donc, il y en a qui sont professionnels, il y en a qui ne sont pas professionnels, mais il faut tout de même les élever à un niveau de connaissance et de compétence, donc du côté système, du côté sécurité aussi, urgence, et du côté charge utile, qui leur permettent d'évoluer en toute sécurité et de vivre à bord de la station. Donc c'est effectivement un entraînement beaucoup plus compact et condensé, sauf si Par exemple, les Émirats Arabes Unis avaient fait des demandes en disant, nous, on veut qu'ils soient bien entraînés. Donc, on a entraîné Sultan et Aza, les astronautes des Émirats Arabes Unis, vraiment de façon hyper sérieuse, hyper dense, hyper complète. Donc, voilà, on a un peu tous les niveaux.
[00:16:51] Speaker B: Ce n'est pas juste toucher à rien.
[00:16:54] Speaker A: Non, parce qu'il va falloir qu'ils vivent déjà à bord. Donc, tout est un petit peu technique pour la vie de tous les jours qui est changée à tous les niveaux, en fin de compte. Donc, la vie à bord, parfois la survie à bord et aussi toutes les procédures d'urgence. Et puis, certains ou certaines vont travailler, vont véritablement réaliser des tâches et donc, il va falloir les former là-dessus aussi.
Mais sinon, pour revenir à l'entraînement des astronautes professionnels, chaque astronaute qui se rend à bord de l'ISS vient s'entraîner à l'EAC, tout comme les astronautes européens vont s'entraîner à Houston, à la Cité des Étoiles et à Tsukuba au Japon.
[00:17:33] Speaker B: Dans ce travail pédagogique finalement, c'est quoi le plus difficile ? Est-ce que c'est les mêmes difficultés que n'importe quel prof de lycée ou il y a des choses qui sont vraiment spécifiques à ça ?
[00:17:48] Speaker A: Alors, il y a eu des difficultés qui ont évolué.
[00:17:52] Speaker B: Pour toi ?
[00:17:53] Speaker A: Oui, quand j'ai débuté, je trouvais ça hyper difficile, la rigueur, la rigueur qu'il fallait avoir. Tu te souviens déjà au basic training, c'était quand même très rigoureux.
Et sur les entraînements ISS, on a une rigueur, on a des objectifs, des standards. tout est scruté par des experts pédagogiques et puis aussi les experts en la matière.
[00:18:13] Speaker B: Tu peux donner un exemple de ce que c'est la rigueur pour ce type d'entraînement ?
[00:18:18] Speaker A: Admettons, on a une charge utile, cette navette Lego qu'il va falloir manipuler à bord de la station. À l'intérieur, il y a un truc caché, etc. Donc, on va devoir estimer avec les experts combien de temps ça va prendre en termes d'entraînement.
récupérer les pièces, les monter, peut-être les brancher, les sécuriser, et ensuite opérer cette charge utile. Donc déjà, il y a la définition de l'entraînement, de sa durée, dans un premier temps. Et puis ensuite, très rapidement, on arrive face à un espèce de canevas pédagogique qu'il va falloir remplir.
Alors ça, la première fois que tu le vois, tu dis ok. Donc il va falloir choisir, définir des levels of learning, des niveaux d'apprentissage, de compétences, où tout est codifié à un niveau cognitif, un niveau affectif, etc.
[00:19:13] Speaker B: Un niveau affectif.
[00:19:14] Speaker A: Oui voilà, donc tout est rangé. Tout est rangé. Tu as une matrice, en fait, où on va évaluer le niveau requis, par exemple, si c'est juste observateur, débutant, expert.
[00:19:25] Speaker B: Ok, tu ne formes pas tous les astronautes à un même niveau, sur la même leçon.
[00:19:29] Speaker A: Non, effectivement.
[00:19:32] Speaker B: Donc ok, disons que tu formes un expert sur une leçon. Il a un critère affectif ?
[00:19:38] Speaker A: Alors, pour certaines leçons, oui.
[00:19:40] Speaker B: C'est-à-dire ?
[00:19:40] Speaker A: Mais pour d'autres... Par exemple, il va falloir définir avec des mots-clés les objectifs pédagogiques de ta leçon.
[00:19:49] Speaker B: OK.
[00:19:49] Speaker A: Et pour pouvoir les rédiger correctement, tu vas devoir aller chercher des verbes. Et ces verbes sont rangés... Tu te souviens ? Ils sont rangés dans une matrice et tu as oublié qu'il y a une colonne affective. Mais il y en a une. J'avais oublié, oui. Et donc, voilà.
et si tu n'arrives pas à démarrer ton objectif pédagogique par le verbe, par le verbe qui convient, et bien c'est que tu t'es gouré.
Il faut tout recommencer. Donc tu fais ça, tu fais le nombre d'objectifs. Donc par exemple, on a dit récupérer toutes les pièces, s'assurer qu'elles sont toutes là, les assembler, brancher et ensuite sécuriser et opérer. Donc tu vois, c'est que des verbes que je t'ai sorti.
Et puis après, tu as la dimension aider ou pas aider. Est-ce que tu vas le faire seul ? Est-ce que tu vas le faire avec l'aide du sol ? Est-ce que tu vas le faire avec l'aide d'une procédure en réalité virtuelle, etc. Procédures, il y en a toujours une. Et donc, il va falloir remplir ce canevas avec des profondeurs. Il faut vraiment définir une stratégie pour ta leçon aussi, si tu veux aller du plus simple au plus compliqué, du plus petit au plus grand, etc. Et tu dois documenter tout ça. Et ça, c'était super dur parce que moi, j'avais envie d'ouvrir mon ordi et de créer un cours. Donc, il fallait absolument passer par ce filtre-là qui prend des semaines, parfois des mois.
[00:21:12] Speaker B: La distinction dont je me souviens, c'est que Tu dois créer un cours que quelqu'un d'autre peut donner. En gros, si t'es malade le jour du cours, il faut absolument que quelqu'un d'autre puisse prendre ton cours et le donner.
[00:21:25] Speaker A: Quelqu'un qui soit certifié en théorie.
[00:21:28] Speaker B: Bien sûr. Effectivement. Quelqu'un qui a passé, qui a fait l'école des apprenants aux astronautes.
Et j'avais trouvé ça très difficile finalement parce que normalement tu peux te dire ok c'est mon cours, je sais comment le donner, on m'a donné les objectifs, on s'est mis d'accord sur tout puis le reste je le fais. Non, là c'est pas comme ça.
[00:21:48] Speaker A: Tu touches du doigt. Deuxième truc super difficile pour moi c'est de scripter une leçon. On te demande de rédiger un script qui s'appelle le lesson plan part 3 que tout le monde déteste.
Et il va falloir scripter l'intégralité de ton cours que tu vas donner et le mettre à jour à chaque fois que tu modifies ton contenu. Et ça va très, très loin. On dirait que tu codes un programme. Toi, je ne sais pas si tu te souviens, mais on devait mettre d'abord intro, accroche. Et puis après, tu dis ce que tu vas dire. Humour, question de relance, question rhétorique, contenu.
[00:22:28] Speaker B: Il y a des choses dont je me sers encore quand j'écris un script pour n'importe quel discours, par exemple.
Je me souviens qu'entre une partie et une autre partie, on devait marquer TR en lettres majuscules pour transition. C'est un entrecrochet.
[00:22:43] Speaker A: Les fameuses transitions.
[00:22:44] Speaker B: Je le fais toujours. L'idée, c'est qu'on ne pouvait pas avoir des entrées pédagogiques et puis une autre entrée pédagogique directement. Il fallait mettre une phrase de transition et donc, il fallait marquer TR pour bien faire comprendre que ça, c'est la transition.
[00:22:57] Speaker A: Et puis, surtout pour que le contenu soit digeste. On forme sur un contenu qui est haut niveau. Alors bon, je n'ai pas pris un super exemple, mais souvent, les charges utiles, c'est des trucs qu'on n'a jamais vu. Parfois, on ne sait pas. Et puis, la façon dont on les opère n'est pas toujours possible sur Terre aussi. Donc, c'est un contenu où on va solliciter de l'imagination, beaucoup de précision, des bases scientifiques aussi, parfois qui ne sont pas ni les miennes, ni celles de la personne en face. Donc, il faut que ce soit digeste.
[00:23:31] Speaker B: Mais c'est vrai, tu as raison. Je me souviens que quand on décide de faire de l'humour dans la leçon, il fallait marquer «humour» en lettre à l'affichier et ensuite marquer ta blague pour que si jamais c'est quelqu'un d'autre qui le fait comprenne que c'est de l'humour.
[00:23:46] Speaker A: Mais oui, donc ça c'était quelque chose de très difficile. Enfin c'était difficile parce que ça m'agacait.
et parce que je n'avais pas perçu au combien c'était un outil efficace, pérenne, super, et puis aussi parce qu'on pouvait avoir le luxe de l'utiliser cet outil-là. Il y a d'autres domaines où il faut aller beaucoup plus vite et beaucoup plus en surface, moins en profondeur en tout cas. Mais au fil du temps, j'ai trouvé que c'était extrêmement efficace comme technique. Donc tu remplis ce Canva qui va être analysé par des experts en pédagogie, ils vont te faire des remarques, tu corriges, etc. Ensuite, tu te lances dans le développement du contenu qui va être par exemple une présentation PowerPoint, etc. Ensuite, le développement du script.
Et en phase finale, tu vas donner des dry run, donc en fait des répétitions, jusqu'à aller à la répétition générale. Et dans cette répétition générale, tu as les experts pédagogiques, les experts en la matière, donc les experts si tu entraînes sur une charge utile, sur la radiation, ceux qui ont développé la charge utile et ceux qui sont les investigateurs principaux de la charge utile, les scientifiques par exemple. Et puis, il faut impérativement que ton élève soit un astronaute.
[00:24:57] Speaker B: L'élève de la répète générale.
[00:24:58] Speaker A: L'élève de la répète générale qui est ta certification.
[00:25:03] Speaker B: Comme ça, elle ou lui peut se dire non, ça ne marche pas.
[00:25:06] Speaker A: C'est nul ou alors c'est excellent.
[00:25:08] Speaker B: Et on reste quand même dans, malgré ce cadre de rigueur, on reste quand même dans quelque chose de très... Encore une fois, c'est de la transmission, c'est du partage, c'est des choses qui normalement rendent heureux. Est-ce que Il y a encore de ça malgré le cadre de rigueur ? Chez moi ?
[00:25:29] Speaker A: Oui. Moi, il n'y a rien qui me rend plus heureuse que la pédagogie, que d'enseigner. Je trouve ça extraordinaire, ça m'a toujours intéressée.
Et puis ma maman est enseignante aussi, j'étais à bonne école, c'est une super prof.
Et c'est une façon d'enrichir les gens qui est sous-cotée. C'est quand même... L'acquisition de compétences, quand on t'offre d'acquérir des compétences, c'est souvent, tu es dans une boîte ou quelque part, on te dit il va falloir vous former, je dois rancir sur ce nouveau truc, etc.
Mais c'est génial. On te permet de devenir plus intelligent, de faire de la gym à ton cerveau. Je ne sais pas toi, mais moi, j'avais téléchargé il y a quelques années une des applications pour faire de la gym à mon cerveau. Je ne me rappelle plus comment ça s'appelait, mais c'était Mind quelque chose.
Et puis, au bout d'un moment, je me suis dit, non, mais en fait, bosse plutôt tes trucs au boulot, là. T'as du travail, on te propose de suivre telle, telle, telle formation. Et voilà, je trouve que c'est assez sous-côté, comme j'ai dit, mais c'est pas assez mis en valeur quand tu as la capacité d'apprendre et d'enseigner.
[00:26:48] Speaker B: Et surtout d'enseigner.
[00:26:49] Speaker A: Je trouve ça génial. Alors, par contre, être formateur d'astronaute, il faut que t'aimes apprendre aussi. Alors là, t'es obligé parce qu'avant toute chose, tu vas devoir toi-même te former sur des domaines scientifiques qui sont parfois tellement à la pointe que je ne sais pas trop de quoi on parle, des machines que, encore une fois, tu n'as jamais vues, des techniques, des gestuels, des dextérités, dérouler tes procédures. Il faut que tu aimes et que tu sois capable de le faire d'abord toi-même. Donc, c'est un apprentissage très long en première phase.
[00:27:22] Speaker B: Donc il faut aimer apprendre, il faut aimer enseigner, ça c'est clair. T'as parlé tout à l'heure de l'aspect international aussi, de tes apprenants finalement. Est-ce que la compétence interculturelle c'est quelque chose d'important ou est-ce que c'est secondaire quand on enseigne à des astronautes ?
[00:27:38] Speaker A: C'est quelque chose qui est très présent. Alors, ça fluctue en fonction des périodes. Les choses peuvent se niveler un petit peu au fil du temps, avec une population qui parle de plus en plus anglais, par exemple.
des grandes différences parfois entre un entraînement avec des astronautes texans et des cosmonautes russes avec traductrices, toujours. Et donc, ça, c'était très important aussi de connaître leur rythme, de savoir comment ça allait se passer, etc. Ça, ce sont des choses qui s'atténuent un petit peu, puisque tous les astronautes parlent très bien anglais maintenant. Et puis, je pense qu'il va y avoir avec des changements, avec une nouvelle population qu'on a eue déjà avec les passagers d'Axiome, des nouvelles nations, une population un peu moins homogène. Donc, je pense que c'est toujours hyper important, quand on a ce désir de vraiment ancrer des connaissances et des compétences, de savoir qui est en face de toi, de savoir quel est leur rythme, quelle est leur tradition, par exemple. Je ne vais peut-être pas me comporter de la même façon Il n'y a même pas de peut-être dans cette phrase. Je ne vais pas me comporter de la même façon quand j'entraîne des rookies ou des astronautes qui sont déjà partis trois fois, ou des astronautes japonais qui ont vraiment cette culture de l'éducation du sensei et du maître. J'adore parce que t'es vraiment le maître.
Et ces marques de respect ne vont pas être représentées de la même façon ou du tout auprès d'une autre population. Donc oui, c'est fondamental, selon moi. Mais encore une fois, ça ne concerne que moi et je ne suis pas sûre qu'on fonctionne tous de la même façon dans l'équipe.
[00:29:34] Speaker B: C'est des...
des moments uniques pour les astronautes. On l'a dit, c'est pour ça aussi que l'entraînement est aussi exigeant, parce qu'eux, ils viennent là une fois. Des fois, ils arrivent en jet lag complet parce qu'ils sont partis du Texas la veille. Ils arrivent, ils ne savent pas quelle heure il est. Il t'est arrivé des catastrophes, on va dire, au niveau pédagogique ?
[00:29:55] Speaker A: Des catastrophes au niveau pédagogique ? Non. Après, il y a eu des moments un peu marrants.
des moments un peu marrants avec des astronautes méga fatigués, avec des astronautes qui avaient oublié leurs fringues de sport.
Il y avait des charges utiles qui nécessitaient d'être en short et en débardeur parce qu'on doit marquer sur la peau des points de mesure, voilà, pour mesurer l'élasticité de certains muscles, de certains tendons faciaux, de la peau, des machins, etc. Donc déjà, c'est quand même bizarre d'aller marquer le corps de ton collègue que tu ne connais pas du tout. Donc voilà, mais bon. Mais surtout, quand il a oublié ses fringues de sport et que moi, je dois lui prêter un petit short.
[00:30:43] Speaker B: Un t-shirt rose à toi.
[00:30:48] Speaker A: On a eu des petits moments, des petites tenues sympas. Et puis on a aussi des cas de figures qui sont un peu plus subtiles. On a des astronautes qui restent longtemps à l'EAC parce qu'on On doit les élever à un niveau spécialiste. Sur une manip compliquée, ils vont rester une, deux, trois semaines. Je me souviens de deux choses qui ont attrait toutes les deux à la nourriture. Je me souviens, je crois que je l'avais raconté, d'un astronaute qui était super énervé, super énervé, alors que c'est un amour.
[00:31:24] Speaker B: Mais pas contre toi.
[00:31:25] Speaker A: Non, non, non. Mais il était énervé tout le temps. C'est pas possible. Qu'est-ce qui se passe? Et donc, de fil en aiguille, je me suis rendu compte que il n'arrivait pas à observer son régime habituel à Cologne. Parce qu'on a une cantine, pas à l'EAC, mais sur le campus de DLR. Cette cantine, c'est pas... Alors, t'as toujours des saucisses et des pommes de terre.
[00:31:49] Speaker B: C'est une cantine allemande. Si tu veux manger des frites tous les jours, tu peux.
[00:31:51] Speaker A: Ah, t'es patate et des saucisses tous les jours, tu peux. Absolument. Mais quand tu observes un régime particulier, notamment un régime kéto, C'était un peu compliqué pour cette personne parce que c'est méga sportif.
[00:32:03] Speaker B: C'est quoi le régime kéto ?
[00:32:06] Speaker A: Un régime kéto, alors je ne suis pas experte, mais c'est un régime qui est basé, c'est un régime cétogène où tu vas éduquer ton corps à puiser dans des réserves lipidiques. Donc, tu vois, tu peux manger des glucides, des protéines et des lipides. Et ce régime exclut les glucides.
[00:32:27] Speaker B: C'est-à-dire que tu vas arrêter de manger du sucre ?
[00:32:29] Speaker A: Tu arrêtes de manger du sucre, du pain, des choses comme ça, et tu vas vraiment te nourrir, grosso modo, de sauciflard, de viande.
[00:32:38] Speaker B: C'est parfait pour la cantine de l'Allemagne.
[00:32:40] Speaker A: Ouais, mais c'était pas assez varié, il fallait... Et puis tu sais, en Allemagne, tu te souviens, la cantine, Ils avaient des diététiciens, mais parfois, tu te dis, mais qu'est-ce qui s'est passé ? Si vous avez un filet de poulet, laissez-le comme ça, grillez-le, limite. Et puis, ils nous mettaient du poulet à Hawaï avec du fromage. Oui. Et en fait, je me suis rendu compte qu'il était fâché parce qu'il n'avait pas le temps de manger correctement et d'aller faire son sport. Je me souviens arriver en salle de classe avec des blancs de poulet, justement, et ça allait beaucoup mieux.
J'ai amené des bonnes poulets, des noix, des amandes et je me débrouillais pour terminer une demi-heure plutôt sur le créneau. Donc, on chargeait vraiment, on était super concentré, il y avait des breaks qu'on ne prenait pas et je lui réservais la gym juste après. Donc, il était refait, il était hyper content. Donc, c'est des attentions qui peuvent paraître un peu... C'est de l'empathie, mais c'est surtout L'empathie, c'est un peu galvaudé, on la sert à toutes les sauces, mais je suis persuadée que c'est essentiel, et puis en plus, dans des salles de classe où on est un élève, un enseignant, si tu déroules ton script comme ça, et j'ai des collègues qui le font et c'est très efficace.
[00:33:54] Speaker B: Et je me souviens qu'effectivement, tu parles d'empathie, mais d'abord, il y avait plusieurs steps dont il fallait s'assurer avant que la leçon puisse se tenir. Dans mon souvenir, il y avait un step qui s'appelait readiness.
Est-ce que l'apprenant est prêt ? Et ça c'est... est-ce qu'il a trop chaud ? Est-ce qu'il a trop froid ? Est-ce qu'il est fatigué ? Est-ce qu'il est en train de regarder son téléphone ? Est-ce qu'il attend quelque chose ? Et donc quand tu parles de cet agacement lié à la nourriture, au manque.
[00:34:28] Speaker A: De temps, à la faim, la frustration.
[00:34:30] Speaker B: De ne pas manger ce qu'on veut, ça c'est...
La readiness, c'est ça. Est-ce qu'on est prêt, finalement, à recevoir autant d'entrées pédagogiques ?
[00:34:39] Speaker A: Mais ça va loin aussi, parce que je ne pense pas que tous les instructeurs de l'équipe dans laquelle je travaille, que j'adore tous, aient envie d'aller aussi loin.
Jusqu'à amener du poulet en cours, si tu veux. Chacun son truc. Moi, c'est la bouffe. Mais j'ai utilisé la nourriture plusieurs fois. On a eu aussi, en période de Covid, des entraînements où il fallait limiter... On ne pouvait pas arrêter l'entraînement.
Il y a des entraînements qui ne pouvaient pas se faire à distance. Déjà, de base, on ne savait pas faire à distance. Là, on a été amené à le faire, donc à se réinventer un peu là-dessus. Mais il y en a que tu ne peux pas faire à distance. Et ceux qui devaient se faire face à face, on limitait le nombre d'intervenants. Parfois, un apprenant se retrouvait souvent avec le même instructeur et ça pouvait être long.
Ça pouvait être long. Et je me souviens de longues semaines d'entraînement où... Ah oui, ça veut dire.
[00:35:41] Speaker B: Que... Excuse-moi, j'avais pas compris. Quand tu dis ça peut être... Ils se retrouvent avec la même personne, c'est-à-dire que pendant une semaine ou deux, t'as un astronaute qui vient à Cologne, il voit la même instructrice, en l'occurrence ça peut être toi, et pendant une semaine, non seulement c'est des cours individuels, mais il voit personne d'autre, puisque c'est Covid.
[00:35:59] Speaker A: Et puis, il faut relancer la joie de rentrer en salle de cours. Je me souviens, je faisais des gâteaux. Je faisais des gâteaux tous les jours.
[00:36:07] Speaker B: La joie, ça passe vraiment par le ventre.
[00:36:09] Speaker A: Non, mais c'est parce qu'après, j'avais ciblé un peu les personnes. Mais je ne sais pas, c'était un moment où on se rassemblait autour de quelque chose.
Donc voilà, des gâteaux, des petits cookies. Mais maison, c'est très important.
[00:36:31] Speaker B: Oui, parce que c'était Covid, chacun faisait ses petits gâteaux, sa petite burrata à la maison, bien sûr.
Et donc ce.. cette passion pédagogique que tu as, je me souviens qu'à l'époque tu.. tu me disais j'ai envie de prendre des.. d'utiliser mes vacances de boulot pour aller à Bordeaux faire des vols paraboliques ou travailler sur les vols paraboliques.
[00:36:54] Speaker A: Ouais.
[00:36:55] Speaker B: Ça t'est venu quand ça déjà ?
[00:36:56] Speaker A: Alors à l'époque où je travaillais à Ça me tue de dire à l'époque, j'ai l'impression.
Ça fait longtemps qu'on travaille dans cette industrie. Toi, vingt ans ?
[00:37:10] Speaker B: Non.
[00:37:10] Speaker A: Dix-neuf ? Non. Dix-huit ?
[00:37:12] Speaker B: Quinze.
[00:37:13] Speaker A: Ah putain, dix-huit. Tu vieillis, tu es bien cool. Mais non, mais c'est vrai, toi t'as débuté à l'EAC en fait.
[00:37:19] Speaker B: Ouais.
[00:37:19] Speaker A: Ouais, c'est pour ça.
[00:37:21] Speaker B: Mais j'avais pas vingt ans quand même. J'ai débuté, j'avais 26-27.
[00:37:25] Speaker A: Pareil, on a fait l'ITC Light, moi j'avais 27 et puis j'ai embauché 28.
[00:37:30] Speaker B: Tu vois, on a des bébés du spatial.
[00:37:32] Speaker A: Des bébés. Ouais, donc à l'époque où je travaillais au CADMOS, c'était le début de Columbus. On était à fond dans les opérations, il fallait les faire et on n'était pas une grande équipe. Donc moi, je m'étais certifiée relativement tôt aux opérations et je prenais des shifts. À l'époque, on avait le week-end, on avait tard le soir, la nuit, etc.
et on m'avait proposé de participer à des vols paraboliques et puis je n'avais pas pu. Il y avait eu trois opportunités à l'époque où j'étais à Toulouse.
[00:38:06] Speaker B: Donc très simplement Laura, les vols paraboliques C'est quoi ? On entend vol 0G, vomi de comète ?
[00:38:12] Speaker A: Alors, on n'entend pas vomi de comète avec Novespace. Novespace, qui est la filière du CNES, qui opère ces vols paraboliques. Donc, je vais essayer de t'expliquer un petit peu de quoi il s'agit. Tu as deux endroits, peut-être trois, je ne parle pas assez de trois pour sûr, mais aujourd'hui deux, assurément, où on peut faire l'expérience de vol parabolique.
[00:38:35] Speaker B: Dans le monde.
[00:38:36] Speaker A: Dans le monde, deux ans dans le monde, aux États-Unis, alors dans le temps en Russie, peut-être encore maintenant, et à Bordeaux, avec donc Novespace, qui est un endroit que tu connais, donc filiale du CNES, qui possède un avion, donc là pour le coup un Airbus A310, avant c'était un Airbus A300, avant c'était une Carrel, Et à l'intérieur de cet avion, on va pouvoir faire plusieurs types de vols. On va pouvoir faire des vols scientifiques, qui sont vraiment le cœur de l'activité de Novespace. Donc les vols scientifiques, des vols découvertes, qui sont des vols commerciaux, et puis des vols d'entraînement. Donc les vols scientifiques, ils vont être sponsorisés par des agences spatiales.
Donc des agences spatiales, l'ESA, l'agence spatiale européenne, le CNES, l'agence spatiale française, et le DLR, l'agence spatiale allemande, vont acheter des campagnes de vols paraboliques scientifiques pour aller y emmener des chercheurs et leur matériel à bord pour faire de la recherche, des démonstrations, des validations dans cette plateforme de gravité partielle.
Les plateformes de gravité partielle, il n'y en a pas des masses des masses. On ne peut pas éteindre la gravité. Ce serait trop bien.
[00:40:05] Speaker B: J'ai vu les journées, les journées grand public, les journées portes ouvertes aux centres d'astronautes. Les gens, à chaque fois, il y a au moins une personne.
[00:40:14] Speaker A: Ils te demandaient ?
[00:40:15] Speaker B: Où est la pièce où on enlève la gravité ?
[00:40:17] Speaker A: Et tu ne les as pas enfermées.
[00:40:20] Speaker B: C'est une question qui revient toujours.
[00:40:22] Speaker A: Ah ouais. Ça ne me surprend pas tant que ça en fait.
Mais donc voilà, une plateforme de gravité partielle. La Station Spatiale Internationale, ça coûte cher quand même d'y aller, c'est compliqué. Vous êtes obligés de vous faire entraîner par des gens comme moi, donc c'est pénible aussi. On a des drop towers qui sont des tours très très hautes du haut desquelles on va pouvoir lâcher.
pas des gens, mais des petites boîtes expérimentales, et on va pouvoir avoir quelques secondes d'impesanteur qui suffisent à certains domaines scientifiques. Et puis après, on a des ballons stratosphériques qui peuvent aussi accueillir des expériences, mais pas des humains.
Et encore une fois, il faut que les manips soient éligibles à ce type de plateforme. Et on a enfin l'avion parabolique, donc les vols paraboliques, qui vont offrir en fait à des personnes et des charges utiles, des machines, plusieurs secondes d'impesanteur, donc exactement entre 22 à 25 par manœuvre. Donc on appelle ça vol parabolique parce que l'avion va décrire une trajectoire de parabole.
Alors pas tout seul, il va être piloté et il va être piloté de façon très spéciale, donc par trois pilotes de façon simultanée.
et ils vont faire en sorte de suivre le plus précisément cette trajectoire qui va offrir une impesanteur de très grande qualité à chaque manœuvre.
[00:41:58] Speaker B: Et comment ça se passe exactement ? J'ai envie de dire comment ça se fait que quand l'avion décrit une parabole, tout d'un coup on est en impesanteur. Moi je l'ai fait cette expérience. Comment ça se fait en fait ?
[00:42:13] Speaker A: Alors, je suis probablement pas la meilleure personne pour parler de la mécanique et de la physique du vol, mais je vais essayer de t'expliquer. Ce qu'on veut essayer de faire, c'est, t'imagines, si j'avais une balle dans la main, c'est de lancer l'avion comme on lancerait une balle. Qu'est-ce qui se passe là si je lance une balle ? Eh bien, je vais accélérer avec un mouvement la balle et au bout d'un moment, je vais ouvrir ma main et la balle va quitter ma main. D'accord ? Et là, elle ne sera plus accélérée. À partir du moment où elle quitte ma main, il n'y a plus rien qui la pousse. D'accord ? Donc, avec l'inertie, elle va monter puis redescendre. Elle ne va pas tomber comme une pierre comme ça. D'accord ? sauf cas exceptionnel.
Donc le principe c'est exactement ça, c'est ce qu'on veut faire sur une trajectoire qui est millimétrée pour pouvoir avoir, donc déjà pour qu'on soit en sécurité à l'intérieur de cet avion, et pour qu'on puisse avoir le la plus grande durée en toute sécurité avec des coups qui soient aussi raisonnables à chaque manœuvre. Donc, en fin de compte, c'est ce que vont faire les pilotes. Donc, tu as un pilote qui est au pitch, donc c'est ce mouvement-là. Pour un avion, tu as ce mouvement-là.
[00:43:26] Speaker B: De haut en bas.
[00:43:27] Speaker A: De haut en bas. Après, tu as le roll.
comme ça, roulé, d'un côté et de l'autre. Et tu as le yoke qui est comme ça, à droite et à gauche. Ce mouvement-là, cette manœuvre-là, on ne l'utilise pas, elle n'est pas pilotée, elle est bloquée.
Et le troisième truc, c'est l'accélération, donc les gaz. Donc t'as un pilote au pitch, t'as un pilote au roll, et t'as un pilote au gaz. Donc ils sont trois à piloter. Dans les avions classiques, t'as un pilote, puis un copilote, voilà, mais t'en as un qui pilote. Là, ils sont trois à piloter en même temps, de façon simultanée et synchrone. Donc c'est une manœuvre où il faut s'entraîner beaucoup pour pouvoir la réussir. Et le principe, c'est d'accélérer l'avion. On l'accélère, on l'accélère, on l'accélère.
et le pilote au pitch va tirer sur le manche jusqu'à atteindre un angle d'assiette de 50 degrés, donc une inclinaison de 50 degrés. Et à partir de ce moment-là, quand on atteint... Alors, cette montée-là, c'est la ressource d'entrée. Donc, on accélère et cette ressource d'entrée, on va peser plus lourd que d'habitude. Avec la montée, l'inclinaison, l'accélération, etc. Donc, on va peser 1,8 à maximum deux fois notre propre poids. Donc, ça paraît rien. C'est effectivement pas grand-chose. Par contre, ça dure.
La ressource d'entrée, je ne sais pas si tu te souviens, mais ce qui est très surprenant, c'est que ça reste et c'est constant. Et ce n'est pas comme une accélération en voiture où ça accélère fort et puis ça s'arrête rapidement. Là, ça reste. Et quand on atteint sur la trajectoire ces 50 degrés d'assiette, Eh bien, le pilote à la poussée au gaz va simplement arrêter cette poussée-là.
[00:45:12] Speaker B: Il coupe les gaz, quoi.
[00:45:13] Speaker A: Alors, il ne les coupe pas, mais il arrête la poussée. Et il y a une annulation des forces qui s'opère à ce moment-là. Donc, tu as la poussée, la traînée, la portance et la dernière qui reste, la force de gravité. Et à partir de ce moment-là, les trois s'annulent. Il ne reste plus que la force de gravité et l'avion est en état de chute libre.
[00:45:35] Speaker B: Comme quand tu lances ta balle finalement, quand la balle quitte ta main.
[00:45:38] Speaker A: Mais le truc qui perturbe un petit peu le cerveau, c'est qu'on peut être en état de chute libre tout en ayant un mouvement ascendant. D'accord ? C'est ce que je disais.
Quand on arrête l'accélération, que l'avion arrête d'être accéléré ou que la balle quitte ma main, elle va continuer à monter, mais l'état va être insuitible. Et c'est ça qui va permettre, tout ce qu'il y a à l'intérieur de l'avion, d'être en apesanteur. Donc avec l'inertie, ça va monter, puis redescendre. Tout ça est très contrôlé. Les pilotes sont attachés, ils ne sont pas là en train de faire n'importe quoi. À l'arrière, les gens sont concentrés sur les vols commerciaux.
un peu moins concentrés, mais ils sont là pour s'amuser aussi. Mais les pilotes, ils contrôlent toute cette trajectoire. En fait, ils doivent suivre toujours de façon millimétrée. Et donc, à la fin de cette phase d'impesanteur, on va rentrer dans la ressource de sortie d'hypergravité aussi, d'hyperpesanteur à nouveau. Là, quand on a un angle d'à peu près 47, 45 degrés, remise de gaz, ressource de sortie et ensuite vol à plat.
[00:46:41] Speaker B: Donc en fait, l'impesanteur, c'est de la chute libre.
[00:46:46] Speaker A: En tout cas, l'avion est mis en état, n'est plus assujetti qu'à cette force-là, qu'à cette force de gravité, donc on est dans un état de chute libre, et donc tout ce qu'il y a à l'intérieur va se retrouver en impesanteur.
[00:46:57] Speaker B: T'as un souvenir, donc, de ta première parabole libre ?
[00:47:02] Speaker A: J'étais à la cantine, voilà, encore une fois.
[00:47:05] Speaker B: De Cologne, du centre.
[00:47:07] Speaker A: Du DLR, de la DLR, du DLR, je ne sais jamais ce qu'il faut dire. Du Centre Européen des Astronautes en tout cas. Et un de mes collègues, Franck Salmen, vient de me voir. Elle me dit, ça te dirait de faire un vol parabolic ? Je lui dirais très drôle.
Il savait que je n'avais pas pu participer à ces trois superbes opportunités à l'époque où je travaillais en France.
Il me dit que c'est très sérieux.
Il me dit qu'il y a une équipe du centre de physiologie du DLR qui a une campagne de vol dans deux semaines.
et ils ont perdu une de leurs sujets. Donc, on ne dit plus cobaye, mais on dit sujet. Donc, c'est une fille et tout le protocole, voilà, c'est un entraînement qui est difficile. Il faut être sur place. Ils avaient tout prévu sur la corpulence, etc. Une fourchette d'âge, être en forme, etc. Ils me disent, est-ce que tu voudrais la remplacer ? Ouais, allez, on y va. Et c'était ma première parabole en apesanteur.
[00:48:07] Speaker B: Donc après ton expérience un peu traumatique de la première parabole, du premier vol, tu as voulu quand même continuer.
[00:48:14] Speaker A: Elle n'était pas traumatique du tout. Elle n'était pas traumatique. Elle pouvait avoir l'air traumatisante comme ça. C'était surtout le protocole avant, après qui était...
qui était un peu spécial et difficile physiquement. Mais ma première parabole de toute ma vie, je m'en souviendrai, je riais tellement que le masque ne collait pas. Il y avait des fuites. Il me disait arrête de rire, arrête de rire. Et c'est irrépressible. Je ne sais pas si tu te souviens, mais on est complètement BA, on sourit beaucoup. Donc, c'était extraordinaire. Et j'ai continué pour une raison assez marrante.
C'est que... Donc, on était anonymisés. Si tu veux, nos données étaient anonymisées. Tu ne peux pas dire que ces données, c'est celles de Jules ou c'est celles de Laura, etc. Il faut que ce soit anonyme. Néanmoins, qu'on sache qui est le sujet. Et on avait un nom de code. On avait un nom de code qui était produit, randomisé, etc. Et je me souviens, mon nom de code, c'était OBX.
[00:49:17] Speaker B: Obélix ?
[00:49:17] Speaker A: Non, mais OBX. Mais tu as entendu Obélix ? Et donc, j'étais dégoûtée et j'avais dit, on ne peut pas le changer ce nom.
Non, non, non, c'est sorti comme ça sur... Ok, OBX, bon. Et donc, cette équipe du DLR avait un partenariat avec le MIT à Boston et ils étudiaient en fait le volume de sang expulsé par le cœur. Donc, par cette technique, en respirant un mélange gazeux, etc., on pouvait définir le cardiac output, le volume de sang. Et donc, c'est une technique non-invasive qui est super intéressante, pas toujours marrante, mais non-invasive, c'est quand même super.
Et en regardant les données, tu peux ségréguer vraiment une population masculine et féminine dans les sujets. Si tu regardes les données, même si tu as un nom de code OBX ou je ne sais pas quoi, tu peux dire ça, c'est un cœur de fille, ça, c'est un cœur d'homme.
[00:50:08] Speaker B: Ça se voit par les données ?
[00:50:10] Speaker A: Oui, ça se voit. Comment ça se fait ? Pas toujours. Parce qu'il y a une élasticité, une fréquence, un volume. En tout cas, c'est ce qu'ils m'ont expliqué.
Et le MIT a dit, il y a deux sujets qui sont intéressants, deux garçons qui sont intéressants pour nous et on va refaire un vol parabolique avec ces deux sujets, plus des nouveaux. Donc un protocole plus ou moins similaire avec de l'échographie en plus, etc. Et donc ils donnent les noms et il y avait trucs et OBX, c'est pas un garçon. Un cœur de garçon en fait.
Alors, j'ai un tout petit cœur, mais qui pulse beaucoup, beaucoup de fluide. Parce que quand t'arrives en impesanteur, tu as un rush de fluide et il faut que le cœur, il envoie tout ça. Et donc, j'ai un cœur élastique, un cœur très élastique. Et ça les a intéressés. Ils ont dit, OK, on prend un autre.
garçon, mais en garde aux bikes. Et donc, il m'a fait revoler après. Et de fil en aiguille, un mauvaise passe, donc il me disait, tiens, tu reviens. Donc, j'étais avec une équipe allemande, mais je parlais français, donc c'est sympa. Et puis, j'ai volé avec le CNES sur une manip dont j'étais en charge.
à l'instruction. Et puis ensuite, j'ai volé avec Lesa. Et donc, le mauvais espace me disait mais tu bouffes à tous les râteliers. Non, mais c'est super, j'ai beaucoup de chance. C'était toujours une disponibilité. Les choses faisaient que. Je n'ai jamais fait le forcing. Ça a toujours été amené et j'ai saisi les opportunités. Et oui, effectivement, il fallait souvent poser des vacances et ça ne m'a jamais dérangé. Bien au contraire, c'était des opportunités extraordinaires.
[00:51:54] Speaker B: Et à un moment, tu as décidé de passer carrément de l'autre côté de la barrière, de ne pas rester simplement utilisatrice ou cobaye, comme tu disais tout à l'heure, mais vraiment faire partie des équipes qui facilite tout ça.
[00:52:07] Speaker A: Alors, je n'ai pas décidé encore. Tu te rendras compte que moi, je ne décide de rien en fait. Et quand j'essaye de décider de quelque chose, ça ne marche pas. Donc, c'était en fin 2016, Thierry Garib, qui est le PDG de Novespace, à l'époque il était CEO et Jean-François Claret qui était président.
ils me disent voilà, on a un projet, on est sollicité par une association qui s'appelle Rêves de Gosses, qui est une superbe association qui permet à des enfants ordinaires et extraordinaires, voilà, de réaliser leurs rêves, de voler en petit avion, donc ça a plein de bénévoles qui viennent et contribuer. Et ils me disaient voilà, on a ce projet, ils nous demandent si ce serait possible éventuellement d'emmener dans l'avion parabolique, des enfants en situation de handicap, des enfants même paraplégiques, et de leur permettre de faire l'expérience de l'impesanteur, de se mettre debout ou de se remettre debout tout seul.
Et donc, à chaque fois que j'en parle, ça me fait quelque chose. Et donc, il me dit, voilà, c'est un projet. Est-ce que tu veux bien t'en charger ? On a une enveloppe qui était donnée par l'ESA. Et donc, voilà, j'ai dit, carrément, c'est magnifique.
[00:53:27] Speaker B: T'en charger, ça veut dire quoi, concrètement ?
[00:53:29] Speaker A: Eh bien, de gérer le projet. Donc, ce n'est pas moi qui allais faire la sélection des enfants, etc., mais de gérer la sélection, de gérer les familles, de faire se parler tous les experts médicaux, de faire rentrer le projet dans une enveloppe budgétaire aussi, d'organiser les déplacements, etc. Donc, gérer ce projet-là.
Et le projet se fait, on sélectionne des enfants dans toute l'Europe et on fait ce vol. On fait ce vol qui a un succès incroyable.
[00:53:59] Speaker B: Et les enfants, ils ont quel type de handicap ?
[00:54:03] Speaker A: Alors, on n'a pas pu avoir beaucoup d'enfants, parce que c'était quand même un pari extrêmement osé, magnifique, c'est la première fois de l'histoire que ça se faisait. On avait des enfants en situation de handicap moteur, donc on avait des myopathies.
On avait des paralysies cérébrales et puis on avait des enfants qui avaient été accidentés. Des garçons, des filles. Des garçons, des filles. Et puis, on avait deux enfants qui, en plus d'un handicap moteur, donc soit une paralysie ou quoi que ce soit, avaient un petit handicap mental et on les a emmenés. Donc, on était équipés. Chaque enfant avait un instructeur et un astronaute.
Ah ouais, il y avait une méga délégation. Et on est parti, on a fait ce vol et c'était sublime. C'était vraiment magnifique. Beaucoup, beaucoup d'émotions. Et puis, tout s'est hyper bien passé. C'est ça aussi. Les enfants, les ados, on avait deux adultes aussi. On avait un Allemand qui était tétraplégique.
Et ils ont fait ce vol de façon magistrale, ils se sont éclatés, c'était extraordinaire, vraiment extraordinaire.
[00:55:20] Speaker B: Quand tu vois quelqu'un qui passe sa vie en fauteuil et qui tout d'un coup arrive à tenir sur ses jambes parce qu'il est dans l'avion devant toi, Qu'est-ce que tu ressens ?
[00:55:29] Speaker A: Alors déjà moi j'essaye de freiner cette fibre là qui est hyper présente, qui est hyper hyper présente parce qu'on est là pour travailler, on est là pour les garder en sécurité donc on a une Moi, j'essaye de me focaliser très très fort et je me focalise très très fort sur le vol, sur assurer, sur tout faire comme il faut, être alerte, etc. Donc, je m'empêche d'avoir des émotions. Par contre, quand on revoit, quand tu mets pied à terre, que tu te fais à chaud le truc et quand tu revois des images, c'est extraordinaire de pouvoir faire ça. Et je trouve qu'on n'en a pas assez parlé.
[00:56:12] Speaker B: En parlant de handicap ou de handicapé, moi quand je me suis pointé au mon premier vol parabolique, j'étais invité par Novespace à être dans l'avion pendant lequel Thomas Pesquet allait passer son permis de vol parabolique puisqu'il est pilote.
[00:56:30] Speaker A: Tu n'as pas eu trop peur ?
[00:56:32] Speaker B: Non. J'avais encore plus confiance parce qu'en plus quand je me suis pointé, je me suis rendu compte que mon instructrice c'était toi.
[00:56:38] Speaker A: Et je ne le savais pas.
[00:56:40] Speaker B: Je suis arrivé, j'étais un peu stressé le matin, c'était très tourbe, j'aime pas me lever tôt le matin. Et j'aime pas l'avion en plus. Voilà, ça va, mais à l'époque j'aimais pas trop l'avion. Et donc j'arrive fatigué, un peu stressé, un peu tendu, mais en même temps content. Et je vois tous les gens qui sont dans mon équipe et instructrice Laura.
[00:56:59] Speaker A: Ça t'a rassuré ou ça t'a fait flipper ?
[00:57:02] Speaker B: Franchement, j'étais content. Pour le coup, ma première parabole était beaucoup plus libre que la tienne. On pouvait faire ce qu'on voulait.
Je me rappelle que tu m'avais conseillé d'être allongé sur le dos pour bien ressentir toutes les sensations de la ressource dont tu parlais.
Et j'avais fermé les yeux. Et au moment où j'avais réouvert les yeux, on était déjà en impesanteur et le plafond était là.
[00:57:34] Speaker A: C'était dingue.
[00:57:36] Speaker B: Comme dans un rêve, quoi.
[00:57:38] Speaker A: J'avais craint, parce qu'on a parlé des vols scientifiques, mais il y a un autre type de vol qui sont les vols commerciaux. Donc, on a les vols découvertes où ce sont des gens qui vont payer un ticket, un siège pour faire l'expérience d'une quinzaine de paraboles. Et puis, Novespace vend aussi de façon un peu plus exceptionnels, des vols dans leur intégralité à, par exemple, des pays, comme on va faire ce week-end au Portugal, où on a... Je ne vais pas le dire en portugais parce que ça ne va pas le faire, mais c'est Astronautes pour un jour, où le Portugal organise une sélection d'astronautes, de jeunes astronautes, une vraie sélection, vachement dur.
[00:58:20] Speaker B: Pas des astronautes.
[00:58:21] Speaker A: Non, de jeunes, de jeunes étudiants, lycéens, pour pouvoir être pris et faire partie de cette équipe de 40 qui vont faire un vol parabolique dimanche prochain.
[00:58:33] Speaker B: Et tu seras là-bas ?
[00:58:34] Speaker A: Je serai là-bas, je serai avec eux. On a aussi des vols à caractère plus marketing ou publicitaire. Il y a même eu des scènes de films qui ont été tournées. Il y a Tom Cruise qui est venu voler à un mauvais space pour le chef d'oeuvre de la Momie 3.
[00:58:55] Speaker B: Je préfère que ce soit toi qui le dise.
[00:58:58] Speaker A: Alors, il y a une scène extraordinaire, quand même, qui est celle qui a été tournée dans votre avion parabolique, qui est cette scène en impesanteur. Et donc, ils sont venus avec toute son équipe la tourner sur plusieurs vols.
[00:59:12] Speaker B: En tout cas, sur tous les interviews de promo que fait Tom Cruise, il parle de vols paraboliques.
[00:59:20] Speaker A: C'est normal. C'est normal, non ? C'est extra, on a volé avec Usain Bolt. C'était fascinant parce que c'était surtout fascinant de l'observer en train de se préparer.
Ouais, parce que ce monsieur C'est un monument et c'est un type qui est là pour exceller dans le contrôle de son corps en gravité terrestre. Et là, on va lui demander de faire quelque chose dans une gravité qu'il ne connaît pas. Et ça l'inquiétait vraiment.
il se préparait à effectuer une perfo dans un environnement qui était complètement inconnu. Et je me souviens qu'il était venu me voir, il était là avec toute son équipe, les membres de sa famille aussi, et puis il s'échauffait, et il était venu me voir en me disant « Comment tu t'entraînes ? » Alors, qu'est-ce que je vais pouvoir inventer ? C'est un moment pour moi... T'as fait semblant quand même. Non, pas trop.
[01:00:27] Speaker B: Tu lui as dit, il n'y a rien à faire.
[01:00:29] Speaker A: Je lui ai dit, regarde-moi si j'y arrive, ça va bien se passer. Et donc, sur les vols découvertes, on a des équipes. L'avion est divisé en quatre. On a dix passagers par équipe. Et par équipe, tu as un instructeur et un personnel navigant de sécurité, PNS.
Et souvent, je me montais la tête en me disant, mince, mes passagers qui vont arriver, qui vont voir qu'ils sont avec la seule fille instructeur.
Ils vont vriller. Ils vont être dégoûtés. Mais moi, je me disais ça. Je me disais, ils vont être dégoûtés. Ils vont avoir peur. En plus, ils vont voir que je suis la plus petite, que je touche pas le plafond. Parce que toi, tu touches le plafond. Oui. Donc, tu te stabilises. Moi, je peux pas me stabiliser comme ça.
[01:01:10] Speaker B: Oui, mais il y a des crochets en bas. Tu mets tes pieds dedans.
[01:01:12] Speaker A: Oui, il y a des crochets, mais il faut pouvoir bouger.
[01:01:14] Speaker B: Il y a des armées.
[01:01:14] Speaker A: Il faut pouvoir te rattraper. Tu te souviens pas ? Moi, je t'ai rattrapé.
[01:01:17] Speaker B: Si, tu m'as rattrapé. Je me souviens très bien.
Pour se plaquer au sol.
[01:01:21] Speaker A: Pour se plaquer violemment. Pour pas que je me blesse. Bah oui, parce que si tu retombes de 0G à 2G... Oui, parce que.
[01:01:29] Speaker B: Ce qui est dangereux quand même, c'est que tu as une liberté incroyable en trois dimensions pendant les 22-25 secondes d'un pesanteur. Tu peux te retrouver effectivement la tête en bas, tu peux t'asseoir au plafond, c'est un truc qui est super à faire.
[01:01:43] Speaker A: C'est génial ça, ouais.
[01:01:44] Speaker B: Le problème, c'est que le passage de 0G à 1 et plus, il se fait en une seconde. Si t'as pas bien écouté... Enfin, en tout cas, c'est comme ça que ça se ressent. Je sais pas si c'est une seconde ou une demi-seconde. Voilà, faut bien écouter son instructrice.
[01:01:57] Speaker A: C'est normal, c'est normal. T'es complètement ouah, comme ça. Et nous on hurle, mettez les pieds au sol !
[01:02:03] Speaker B: Tu peux te faire très très mal.
[01:02:07] Speaker A: On a un mauvais espace, on est formé et on fait très attention à ça. Mais si t'es pas encadré correctement, si t'es pas formé au préalable et si t'es pas un minimum docile, tu peux te faire mal. Tu peux te faire mal, vraiment. Parce que, comme tu l'as justement expliqué, si t'es scotché au plafond à zéro G et que tu retombes d'un seul coup sans t'y être préparé, Et en fait, t'as quelques secondes quand même pour te préparer. Nous, on a des indications audio dans la cabine, tu vois. On a… Il n'y a pas de vitre. Les hublots sont calfeutrés. T'as tout le capitonnage qui bouge cette vue-là, pour des besoins scientifiques et puis aussi parce que ça n'apporte rien.
Ce serait potentiellement dangereux. Si bien que nous, naviguant, comment on sait pour savoir où on en est dans la manœuvre ? Justement, les pilotes nous indiquent où ils en sont par des codes.
Ils nous font des comptes à rebours, ils nous indiquent l'angle d'inclinaison de l'avion. Et nous, on a l'habitude. Mais toi, si tu entends 30, 40, instinctivement, tu ne vas pas comprendre. Dépêche-toi de t'asseoir ! ou d'attraper une main courante. Et c'est ça qu'on vous communique. Donc, les vols découvertes, c'est sensationnel parce que déjà, t'es en apesanteur avec tes passagers. Mais surtout, tu te prends à chaque fois des charges de bonheur que tu ressens. Je pense que les passagers Et nous-mêmes, on produit des tas d'hormones, de plaisir, de bien-être qui diffusent. Et ce sont des moments très addictifs.
[01:03:54] Speaker B: Je me souviens de la... Tu parlais de la banane tout à l'heure. Je me souviens vraiment de ça.
La première parabole, la première fois que tu te retrouves en impesanteur, rien ne pèse dans ton corps.
[01:04:07] Speaker A: Plus rien.
[01:04:07] Speaker B: Tes organes ne pèsent pas les unes sur les autres.
[01:04:11] Speaker A: Il n'y a plus de poids, à proprement parler.
[01:04:13] Speaker B: Exactement. Il y a vraiment cette vague de bonheur. Tu as un sourire jusqu'aux oreilles qui est tellement spontané, qui est tellement instinctif, presque.
[01:04:28] Speaker A: C'est justement difficile d'en parler, parce que est-ce que c'est instinctif, vraiment ? Est-ce qu'on vient retrouver quelque chose qui est très profond, ancré en nous, dont on n'a plus conscience ? Puis en plus de ça, au niveau sensoriel, on a un reset qui est fait sur certains sens. C'est-à-dire ? En fait, tu sais, tu as la vue, alors nous on a l'habitude, on peut ouvrir, fermer les yeux, on contrôle très très bien ce sens-là, pareil les oreilles, on bouge les oreilles, bon ça va, on a un bon contrôle de ce truc-là.
Par contre, il y a des influx sensoriels, des informations qui sont envoyées au système nerveux central dont on a moins conscience. Par exemple, tout ce qui est neuro-vestibulaire, donc on le sent quand on a le mal de verre, mais sinon, là, on ne sent pas qu'on a notre oreille interne qui nous donne à chaque instant une information.
[01:05:24] Speaker B: D'accord ? Le fait de savoir que les pieds.
[01:05:26] Speaker A: Sont au sol, Alors ça c'est la proprioception, c'est la peau, les muscles justement, extéroception, proprioception, c'est encore en plus, ça on le sent pas par exemple, en permanence.
tu as un influx sensoriel qui dit ma tête est droite, ma tête est droite, ma tête est droite, mes pieds touchent le sol, et bien ça vient de l'oreille interne. Pour tout ce qui est extéroceptif, c'est ta peau. Donc là, elle va dire je suis en contact avec quelque chose au niveau des fesses, des cuisses et du bas du dos. Il se peut qu'on soit assis. C'est ça à chaque instant.
Donc, sous les pieds, pareil. Et pareil, quand tu te mets debout, t'as la vue qui dit « Ah ouais, je suis un peu plus haute par rapport à la porte », t'as des repères visuels intermédiaires, etc. À chaque instant. Et en fait, quand t'es en impesanteur, eh ben, on a tout ce qui est proprioceptif et extéroceptif. Donc, toute l'information... Par exemple, là, j'ai mes articulations du genou qui disent « On est plié, on est plié. Il y a de grandes chances qu'on soit assis. » Et tout ça est corroboré par la vue, par l'orientation. Mais si tu bascules le canapé, là, comme ça, on va avoir un conflit sensoriel court, si tu veux. Les genoux ou les cuisses vont dire, on est en position assise, l'oreille interne va dire, non, pas du tout, on est allongé et les yeux vont dire, je vois le plafond, c'est bon. Et ça, on n'a pas conscience de ça. Moi, c'est ce qui m'a marquée très, très fort, c'est que ma première parabole en impesanteur, j'ai quand même eu un reset de tout mon corps.
et j'ai trouvé ça génial.
Alors, est-ce que ça a contribué à cette béatitude, ce sourire-là, ou est-ce que, comme tu disais, on a quelque chose de beaucoup plus instinctif ? J'en sais rien, en tout cas, c'est toujours génial.
[01:07:11] Speaker B: En tout cas, il y a une chose que je fais de...
tout le temps maintenant, dès que je suis en présence d'enfants très très jeunes, c'est que je les lance en l'air comme ça. Et je regarde leur sourire. Non mais tu sais, je les rattrape. Et cette demi-seconde où ils sont aussi en apesanteur, comme tu t'expliquais avec la balle tout à l'heure, tu les lances. Il n'y a pas un enfant qui n'aime pas ça. C'est leur truc préféré. T'as l'impression que tu les lances, tu les mets en apesanteur pendant une demi-seconde, t'as l'impression que c'est leur truc préféré.
[01:07:43] Speaker A: Ouais, c'est marrant.
[01:07:44] Speaker B: Et je me demande s'il n'y a pas quelque chose d'instinctif quand même là-dedans, tu vois.
[01:07:48] Speaker A: Ah, mais je... Moi, j'ai tendance à te rejoindre là-dessus. Mais c'est difficile d'en parler, c'est difficile de l'expliquer.
Mais je te rejoins là-dessus. Je vais essayer, je vais essayer.
[01:08:03] Speaker B: Et donc, est-ce que tu peux nous dire pourquoi c'est intéressant pour des scientifiques de venir avec leur expérience dans un vol parabolique ?
[01:08:10] Speaker A: Alors, déjà, ils travaillent là-dedans, à priori, où ils veulent démontrer quelque chose ou faire de la recherche en impesanteur. Et c'est hyper intéressant parce que c'est beaucoup moins contraignant et beaucoup moins coûteux que d'emmener une manip à bord de l'ISS.
Alors bien sûr, tous les domaines scientifiques ne sont pas éligibles au vol parabolique. Il faut que les scientifiques puissent mener à bien leur protocole de recherche sur des manœuvres somme toute courtes. Et puis, il y a des choses qui ne sont pas observables. Par exemple, on ne va pas regarder la fonte musculaire ou la déminéralisation osseuse sur un organisme vivant sur des périodes aussi courtes. Peut-être sur des cellules, mais il faut que le protocole et le domaine soit éligible à ces manœuvres-là.
Donc, on a des choses instantanément qui fonctionnent bien. Tout ce qui est physique des fluides, les fluides, tu vois, ils se comportent instantanément différemment quand ils sont plus assujettis, quand ils sont en empesanteur. On a tout ce qui est matière granulaire aussi, ou tout ce qui est neurovestibulaire. Les choses, parce qu'encore une fois, tu as des fluides. Donc, voilà, on a beaucoup de domaines scientifiques où on va observer, où les scientifiques vont observer des modifications instantanées.
et c'est hyper important pour faire progresser la recherche, la science dans la matière, ou pour améliorer ou valider des protocoles ou des procédures, ou des procédés, pour notre industrie sur Terre par exemple. Mais c'est aussi parfois la seule façon d'observer certains phénomènes.
Tu vois, par exemple, en apesanteur, tu peux plus observer certaines forces. Donc la sédimentation ou stratification, on ne la voit plus. Tu vois, les trucs les plus lourds qui tombent vers le bas, ça n'existe plus.
[01:10:03] Speaker B: Oui, bien sûr. Il n'y a plus de haut, il n'y a plus de bas.
[01:10:07] Speaker A: La densité, ça n'a plus véritablement d'impact. On n'a pas de convection, de force de convection non plus. Tu sais, quand tu fais bouillir des coquillettes, tu as ce mouvement-là. Si tu as une casserole en verre, tu peux le voir.
[01:10:22] Speaker B: Le chaud va vers le haut.
[01:10:24] Speaker A: Voilà, exactement. Eh bien, si tu fais une ébullition en apesanteur, pareil, tu ne vas pas avoir des bulles qui montent comme ça, tu vas avoir une grosse bulle.
qui gonfle, qui gonfle, qui gonfle comme ça. Et là, tu te dis, mais à quoi ça sert ? Eh bien, ça sert à faire progresser la science pour améliorer les procédés qui utilisent l'ébullition. Parce qu'on va observer des phénomènes qui sont absolument inobservables et on va pouvoir voir des choses qu'on ne peut pas voir et on va pouvoir avoir de nouvelles idées pour améliorer certains procédés. De la même façon, tu vois, parce que c'est une émulsion, C'est une émulsion, c'est deux fluides ou plus, qui sont à priori peu ou non miscibles, qui ne sont pas mélangés.
vinaigre et huile et tu vas vouloir les émulsionner pour qu'ils se mélangent pour faire une petite vinaigrette. Donc soit tu peux avoir une émulsion mécanique où tu vas secouer comme ça et puis ça va rester un peu comme ça un certain temps et puis après il va y avoir une séparation de phase à cause de la densité ou tu peux avoir recours à un émulsifiant. Un émulsifiant c'est un truc qui va tenir d'un côté le vinaigre et de l'autre l'huile et qui va stabiliser cette émulsion.
pour la mayonnaise, c'est le jaune d'œuf. Tu vois ? Sauf que la vinaigrette, tu la laisses deux jours sur ton plan de travail et la nature va... Ça se re-sépare. Ça se re-sépare. Donc ça, c'est parce que, ben voilà, on a ces problèmes de densité, etc. Ces problèmes. On a ces trucs de densité. C'est aussi pour ça que dans beaucoup d'aliments ou de cosmétiques, on a des émulsifiants pour stabiliser ces émulsions. Sinon, ça ne serait pas appétissant.
Donc, on a de la lecithine de soja, par exemple, ou émulsifiant. Eh bien, c'est pour stabiliser, justement, des émulsions. Et on retrouve les émulsions dans plein d'industries. Donc, on va parler de l'industrie alimentaire, cosmétique aussi. Chaque shampoing ou gel douche, c'est une émulsion.
Mais on utilise les émulsions aussi pour refroidir les centrales nucléaires, ou par exemple dans les pipelines, tu as des débris, de la terre, des cailloux, de l'huile et de l'eau. Huile et eau, ça fait une émulsion, et on a grand intérêt à faire voyager ces émulsions plus rapidement, améliorer le procédé. En fait, le comportement des émulsions en impesanteur, il est complètement différent sur Terre.
en microposanteur, et la chance de pouvoir les observer, on va trouver des moyens de mieux faire ces choses-là.
[01:12:58] Speaker B: Parce qu'on va les connaître mieux, parce qu'on les aura testés dans un environnement unique.
[01:13:02] Speaker A: Exactement.
[01:13:03] Speaker B: Et en plus, si j'ai bien compris, c'est l'occasion pour les scientifiques de participer à l'expérience, d'être à côté de leur expérience. Ils ne peuvent pas, tu l'as dit, dans les drop towers, dans ces tours où on fait chuter en chute libre un appareil, ils ne peuvent pas y être, ce n'est pas assez grand. Ils ne peuvent pas aller sur la Station Spatiale Internationale, ils sont obligés de confier ça à des astronautes. Mais là, ils peuvent.
[01:13:27] Speaker A: Là, ils peuvent opérer leur charge utile, faire des ajustements si nécessaire.
Déjà, c'est un accomplissement, c'est extraordinaire en soi, mais techniquement, c'est un gros avantage. C'est un très gros avantage.
[01:13:42] Speaker B: Donc, on l'a dit tout à l'heure, tu es un peu une bébé du spatial, finalement, comme moi. Tu as commencé ta carrière dans le spatial, plus ou moins directement ?
[01:13:50] Speaker A: Absolument directement.
[01:13:52] Speaker B: Et ça fait donc on va pas dire combien d'années mais peu importe dans le spatial. 17-18 ans. Est-ce que tu peux t'imaginer avoir fait ta carrière jusqu'à présent dans un autre secteur ?
[01:14:07] Speaker A: Oui.
[01:14:09] Speaker B: Ouais ?
[01:14:10] Speaker A: Ouais.
[01:14:10] Speaker B: Lequel par exemple ?
[01:14:11] Speaker A: N'importe lequel.
N'importe lequel. Par contre, je pense que je m'éclaterais vachement moins. Je peux m'imaginer tout faire. Je n'ai pas les capacités pour tout faire, mais ça a été vraiment une opportunité, le fruit du hasard. Donc oui, je peux tout à fait. Si ta question, c'est est-ce que je peux m'imaginer dans une autre industrie ? Carrément, carrément. Est-ce que je prendrais autant de plaisir ? J'en doute.
J'en doute. Mais j'aurais pu, j'aurais adoré travailler dans le médical. Ça, c'est, voilà, mes premières amours.
[01:14:50] Speaker B: Est-ce qu'il y a des choses que tu as vécues dans ta carrière, par ta carrière, dont tu te dis, ça, c'est vraiment que dans le spatial ?
[01:14:59] Speaker A: Les vols paraboliques. Les vols paraboliques. Alors, oui, et puis, Pas forcément, parce que je viens d'expliquer qu'il y avait des investigateurs qui font de la recherche dans d'autres domaines et qui peuvent être intéressés, mais à priori ce sont des gens qui vont être dans le spatial, former des astronautes, c'est vraiment que dans le spatial, assister à des lancements.
Je ne sais pas si c'est à ta question, mais toutes ces choses-là, sentir la terre vibrer, chose que tu as ressentie beaucoup plus souvent que moi, parce que tu es allé à beaucoup plus de l'ensemble que moi, mais côtoyer des individus qui font des sacrifices aussi grands, alors qu'ils sont ultra héroïsés, qu'on ne parle pas assez de ce sacrifice, et de participer à cet énorme projet.
Moi j'adore, j'adore, je trouve ça génial de la Z. Quand tu voles, quand tu travailles dans les vols spatio-habités, il y a très peu de chances que tu retrouves, en tout cas moi dans ce que je fais, que tu te retrouves à faire la même chose autre part. Et bizarrement, le vol spatio-habité a besoin de tout, de toutes les industries. On a besoin de cuistot, on a besoin de techniciens, on a besoin de médecins, on a besoin de toutes les compétences.
[01:16:25] Speaker B: De coachs sportifs.
[01:16:26] Speaker A: De coachs sportifs.
[01:16:29] Speaker B: D'ingénieurs informaticiens.
[01:16:30] Speaker A: De tout, tout.
[01:16:31] Speaker B: De communicants.
[01:16:32] Speaker A: Absolument tout.
[01:16:33] Speaker B: Très peu, mais pas les meilleurs.
[01:16:37] Speaker A: C'est un peu comme à l'armée quelque part, même si c'est une comparaison qui n'est peut-être pas la meilleure, mais tu vas retrouver tous les corps de métier. C'est pareil pour le vol spatial habité où on transpose des humains dans un environnement ultra hostile. On a besoin de toutes les compétences.
[01:16:54] Speaker B: Laura, avant de se quitter...
J'ai un round de questions rapides.
[01:16:58] Speaker A: Oui.
[01:16:58] Speaker B: Un petit tour de questions rapides. Donc moi je pose rapidement les questions, toi tu peux prendre le temps d'y répondre si t'as envie. La première question c'est la question moins plus. Est-ce que tu connais la question moins plus ?
[01:17:08] Speaker A: Alors vas-y.
[01:17:10] Speaker B: La question c'est qu'est-ce que t'aurais aimé faire moins dans ta carrière depuis le début jusqu'à maintenant et qu'est-ce que t'aurais aimé faire plus ?
[01:17:19] Speaker A: Si tu me permets de réécrire l'histoire, ouais, j'ai plein de trucs à changer. Si je pouvais réécrire l'histoire, j'aurais aimé être plus mature professionnellement, plus tôt, mais c'est dans l'ordre des choses, c'est pas possible. D'accord, donc je peux pas changer le cours. Alors, j'aurais aimé moins me préoccuper de certaines craintes.
Pas les miennes, celles des autres. De certains a priori, de certains égaux, de certains comportements individualistes. C'est des choses qui m'ont demandé beaucoup d'énergie. En fait, comme tu disais, on est les bébés du spatial. Moi, j'ai débarqué avec toute la fraîcheur et la naïveté puisque je n'ai pas fait une école. Je n'ai pas eu de vocation précoce dans le spatial. Aujourd'hui, c'est une vocation absolument assumée, mais je n'ai pas eu de vocation précoce. Je n'ai pas eu de fascination précoce pour le spatial.
Et il n'y avait pas eu toute cette préparation de terrain avant. On a un entre-soi très fort dans les vols spatio-habités. Entre-soi, ça peut être un gros mot, mais pas du tout. C'est hyper pratique l'entre-soi. On est d'accord hyper vite.
[01:18:25] Speaker B: C'est un côté familial.
[01:18:26] Speaker A: Voilà. Et moi, je suis arrivée avec...
où je voulais travailler à fond avec tout le monde sur plein de trucs, j'étais disponible, j'étais pleine d'énergie, et j'ai heurté certaines personnes parce que, et ben, il y a eu des craintes, il y a eu des interrogations, ils ont se dit Qu'est-ce qu'elle veut faire exactement dans ses craintes de précarier, encore une fois dans une industrie qui est très prestigieuse. Travailler au Centre Open des Astronautes, c'est extraordinaire. Et il y a des gens qui se battent longtemps pour pouvoir y accéder. Et moi, je suis une sorte d'exception.
Peut-être toi aussi parce qu'on ne s'est.
[01:19:08] Speaker B: Pas battu pour y arriver.
[01:19:10] Speaker A: Et c'est super dégueu pour les autres. Mais c'est comme ça. Et ça n'enlève rien à notre capacité à bien travailler. Mais ça interroge et ça a interrogé et ça m'a meurtrie. Et j'ai dépensé énormément d'énergie à essayer d'anticiper certaines craintes. alors que je pense que ça ne sert pas à grand chose. Je pense qu'on peut faire son chemin sans dépenser autant d'énergie comme j'ai pu en dépenser. Donc j'aurais aimé faire moins de focus sur ces choses-là, sur les autres.
[01:19:43] Speaker B: Et plus alors ? Si tu pouvais faire quelque chose de plus, tu ferais quoi ?
[01:19:47] Speaker A: Encore plus de travail en équipe.
être encore plus avec mes collègues, être encore plus avec les jeunes, parler encore plus de ce métier, être encore plus avec les autres.
[01:20:01] Speaker B: Tu as parlé de ce côté famille un petit peu du vol spatial habité, mais on peut parler du spatial de manière générale. Il y a vraiment une culture du spatial. Tout le monde dans le spatial, en tout cas, tous ceux que je rencontre, ont un livre spatial préféré.
Est-ce que toi, tu as un livre spatial préféré ?
[01:20:19] Speaker A: Alors mon livre préféré, tout le monde va en parler dans ce podcast. C'est bien sûr le chef d'oeuvre de Mario Montaigne. Voilà, je suis obligée. J'adore, j'adore ce bouquin. J'adore, j'adore Stéphie.
[01:20:30] Speaker B: Elle est extra.
[01:20:32] Speaker A: Dans la combi de Thomas Pesquet.
mais je dois en trouver un autre. Alors j'ai lu The Right Stuff, qui est l'étoffe des héros. Je n'ai pas lu 36 bouquins dans le spatial, mais celui-là m'a plu parce que ça retrace un petit peu l'histoire de la conquête spatiale américaine à travers les héros, les pilotes d'essai, les premiers instruments américains. Mais il y a une espèce de petite critique subtile de la surhéroïsation qui est faite par la société et les médias, et je trouve ça super chouette. Après, J'ai beaucoup aimé les autobiographies de Scott Kelly et Chris Hadfield parce qu'ils racontent leur mission, ils racontent leur travail et puis ils viennent mettre aussi tout ça en perspective en racontant un peu les défis à relever, le fait de toujours apprendre tout le temps, en permanence, le travail en équipe.
le challenge psychologique aussi, et physique d'une mission de un an. Donc voilà, ça fait trois livres. Ça fait qu'il y a même quatre livres !
[01:21:43] Speaker B: Scott Kelly qui a resté un an dans l'espace et qui a appelé son livre Endurance. Qui est assez fascinant, c'est quelqu'un qui est assez discret finalement.
[01:21:53] Speaker A: Moi il me faisait peur.
Il me faisait peur au début de ma carrière quand il fallait que j'entraîne Scott Kelly. J'étais flippée à fond. En fait, il est hyper gentil.
[01:22:01] Speaker B: Il est gentil, mais il est très discret.
[01:22:03] Speaker A: C'est vrai.
[01:22:03] Speaker B: Donc, j'ai été surpris de le voir écrire ce livre, à vrai dire. Son livre est très bon.
[01:22:09] Speaker A: Il l'a bien fait.
[01:22:11] Speaker B: Et les films, tu as un film préféré, un film spatial préféré. Tout le monde a ça.
[01:22:14] Speaker A: Chez nous, tout le monde a ça. Je sais que t'as vu aucun Star Wars.
[01:22:21] Speaker B: On avait dit qu'on n'en parlait pas.
[01:22:23] Speaker A: Moi non plus.
[01:22:23] Speaker B: Je n'ai vu aucun Star Wars.
[01:22:24] Speaker A: Moi non plus. J'ai vu des booms et c'est tout. Il y en a un qui m'a particulièrement marquée, c'est Proxima, réalisé par Alice Vinocourt. Déjà, j'ai la joie de connaître Alice qui est une fille extra et qui a fait un travail génial, qui a travaillé aussi avec toi et avec Lesa sur ce film. Et j'avais la trouille de voir ce film que j'ai vu assez tardivement. Je ne sais pas si tu te souviens, mais on avait eu un lien où on était un peu privilégié, on pouvait le voir en avance de phase. Il y avait même des projections à Cologne, je crois.
[01:22:58] Speaker B: C'est un tournage qui s'était organisé au Centre des Astronautes à Cologne, grâce à nous, avec nous, et puis dans d'autres endroits. Et on avait suivi, moi j'avais suivi les débuts, même le scénario, etc. C'était très documenté. Alice Winocourt voulait faire un film très proche de la réalité.
[01:23:15] Speaker A: Elle était venue avec ses acteurs, je les avais entraînés. D'ailleurs, ils étaient venus sur une mécharge utile. Et j'ai mis beaucoup de temps à voir ce film.
[01:23:25] Speaker B: T'avais peur de quoi ?
[01:23:26] Speaker A: D'Être blasé.
[01:23:27] Speaker B: C'est-à-dire ?
[01:23:28] Speaker A: J'avais peur de voir des trucs inexacts et qui rendaient pas vrai. C'est horrible de dire ça.
[01:23:37] Speaker B: Mais ça c'est dingue parce que moi quand je l'ai vu, je suis sorti de là au contraire avec le sentiment d'avoir passé une heure et demie à la maison quoi, chez moi.
Tellement c'était réaliste.
[01:23:51] Speaker A: C'est ultra réaliste, c'est un regard extrêmement intime. L'histoire, c'est grosso modo, une astronaute française se prépare à partir pendant un an à bord de la Station Spatiale Internationale, donc entraînement hyper intensif, et elle doit aussi préparer la séparation avec sa fille de 8 ans. Et donc, ça vient soulever un peu tous les défis professionnel en parallèle des challenges émotionnels, parentaux, et c'est réalisé de façon extraordinaire. Et je me souviens, j'ai vu ce film lors d'un festival. Je faisais partie du jury du cinéma.
Et j'ai été balayée par ce film. J'ai rien vu venir. Et à la moitié, je me suis fait embarquer et c'était une émotion folle. C'est très, très beau. C'est très juste, très vrai. Et puis, encore une fois, un regard très intime, très... Voilà, j'adore, j'aime beaucoup ce film. J'aime beaucoup ce film.
[01:24:55] Speaker B: Moi aussi. Quelle est la chose la plus précieuse que tu aies apprise pendant ta carrière ?
[01:25:00] Speaker A: Que l'inertie, les guerres de chapelle, les précarés, etc. Cette inertie, dans cette industrie et très probablement dans d'autres, est extrêmement difficile à contrecarrer.
et qu'on m'explique que c'est difficile et que ce n'est pas grave, qu'il faut être patient et persévérant.
Je n'imaginais absolument pas que les choses pouvaient être si lentes à bouger avec autant de force et d'intelligence. Non, c'est-à-dire que les choses aillent aussi doucement et parfois pas dans la bonne direction. L'inertie.
[01:25:33] Speaker B: Et si tu avais un conseil à donner à une jeune personne aujourd'hui qui voudrait se lancer dans une carrière spatiale, ce serait quoi ?
[01:25:39] Speaker A: Bien asseoir, beaucoup de compétences, hard et soft.
Vraiment, c'est capitalise sur tes connaissances et tes compétences. Forme-toi. Forme-toi à plein de trucs tout le temps. Et la deuxième chose, c'est saisis des opportunités qui t'attirent. Même si a priori, c'est pas dans le spatial. Dans le spatial, on a besoin de tout. Et petit à petit, voilà, je pense que quand on alimente en énergie, même si ce n'est pas exactement où on veut, quand on alimente en énergie positive, quand on travaille en équipe, etc., je suis persuadée que petit à petit, les choses s'orientent vers peut-être cette industrie des vols spatiaux habités. Donc, s'investir, même si apparemment on n'est pas exactement dedans, mais bon, voilà.
[01:26:28] Speaker B: S'investir en tout cas.
[01:26:29] Speaker A: S'investir, se donner à fond.
[01:26:31] Speaker B: Donc Laura, je t'ai demandé de nous amener un objet qui symbolise ton attachement au spatial.
[01:26:36] Speaker A: Oui, alors malheureusement, je n'ai pas pu l'apporter parce qu'il est trop volumineux.
[01:26:41] Speaker B: Il est trop gros.
[01:26:42] Speaker A: Il est trop gros et j'aurais pu choisir quelque chose d'autre, mais voilà, celui-là, c'est mon préféré. Donc, j'ai grandi en Isère et j'allais à l'école qui faisait maternelle, école-collège. Et il y a quelques années, certains années, l'école vendait les bureaux de la maternelle. Donc, c'était les petits bureaux en bois, tu sais, des années 80, des bureaux d'enfants.
[01:27:08] Speaker B: Des tables-bureaux.
[01:27:09] Speaker A: Voilà, des petites tables-bureaux, des colliers, donc avec un petit tiroir, la petite chaise et tout ça.
Mes parents en ont récupéré un, on l'a poncé, on l'a tout réparé et je l'ai emmené à l'ESA avec moi et je fais signer le dessus de ce bureau par tous les astronautes que j'entraîne.
C'est pas vrai. Si, si, c'est cool. Donc, j'ai acheté des stylos spéciaux, etc. Et donc là, il commence à y avoir pas mal de signatures. Alors, il y a des noms qui reviennent, donc ils mettent des tirées avec leur mission dessous. Ça ne me rajeunit pas, mais bon voilà. Avec toutes les couleurs, c'est hyper beau.
Et donc voilà, je pense que je vais bientôt le vernir et puis le donner à ma fille.
[01:27:55] Speaker B: Malora, merci d'être venue jusqu'ici et merci d'être une de celles qui, sur Terre, font l'espace.
[01:28:01] Speaker A: Tout le plaisir est pour moi, merci.
[01:28:03] Speaker B: Merci d'avoir écouté cet épisode de Elles font l'espace, en partenariat avec Novespace. Cet épisode était produit et réalisé par François Bonnet, Cyril Nobillet et Yann Famoutri. Si vous avez aimé, n'hésitez pas à le partager et à nous mettre plein d'étoiles. Et nous, on se retrouve très vite sur vos plateformes préférées pour un nouvel épisode de Elles font l'espace.