Episode Transcript
[00:00:02] Speaker A: Elles font l'espace avec Jules Grandcir.
[00:00:05] Speaker B: Retour aux origines de la saison avec un extrait du tout premier épisode. Fatima Yervolino y partage les défis, parfois inattendus, de son parcours. Un moment fort, tout en sincérité.
C'est quelque chose qui t'a toujours fait rêver, même petite fille.
[00:00:24] Speaker A: Pas spécialement, parce que je n'avais pas vraiment de rôle modèle à la maison dans le domaine. Du coup, je ne savais pas vraiment ce que j'allais faire plus tard, étant jeune. Mes parents n'étaient pas du tout dans le spatial. Je n'ai pas grandi du tout dans ce domaine. Par contre, c'est venu par la suite, au travers de mon parcours professionnel. Cette étincelle dans les yeux que j'ai aujourd'hui s'est révélée au travers de mon parcours professionnel chez Ryan Group, notamment.
[00:00:51] Speaker B: Et quand t'étais petite, tu voulais faire autre chose alors ?
[00:00:55] Speaker A: Je rêvais de faire un site, institutrice, rien à voir.
[00:00:58] Speaker B: Tu voulais être un site ?
[00:00:58] Speaker A: Ah oui, je voulais être d'enseignement. C'était ça, c'était mon rêve, de transmettre des connaissances à d'autres. Clairement, c'était l'éducation qui m'animait. Mes parents n'ayant pas eu la chance d'aller à l'école, c'était pour moi essentiel de transmettre des choses à d'autres.
[00:01:21] Speaker B: Toi, Fatima, t'as grandi en région parisienne, c'est ça ?
[00:01:25] Speaker A: Oui, tout à fait.
[00:01:26] Speaker B: Et t'as dit que tes parents sont arrivés ?
[00:01:28] Speaker A: Ah oui, alors mon père est arrivé du Maroc, dans une vague d'immigration classique dans les années 60, exactement, sortiel à Paris. Et ma mère l'a rejoint à 80, enceinte de moi à l'époque d'ailleurs. Je suis née en France, je suis française.
Et du coup, mes parents, en fait, ils n'ont pas eu la chance d'aller à l'école là-bas. Il n'y avait pas d'école dans leur village. Et clairement, cette injustice m'a marquée parce que très tôt, étant jeune, j'ai dû les aider pas mal sur l'administratif. J'ai dû faire des choses que je ne devais peut-être pas faire à mon âge.
Ça m'a fait grandir très vite.
[00:02:01] Speaker B: Pour planter un peu le décor, tu es donc en région parisienne. Tu es une petite fille, tu habites chez tes parents avec tes cinq frères et sœurs. Et à cette époque-là, tu vas à l'école. Tu es une bonne élève à l'école ?
[00:02:13] Speaker A: Oui, oui, visiblement, j'avais des bonnes notes. J'étais très scolaire.
[00:02:16] Speaker B: Et toi, tu avais des rêves de carrière ?
[00:02:21] Speaker A: Écoute, honnêtement, moi, je rêvais d'une vie indépendante, de vivre ma vie, tout simplement.
J'ai grandi dans un contexte culturel pas forcément favorable à une vie indépendante étant jeune femme. Dans mon contexte familial, souvent, en tout cas moi, j'ai eu droit à la proposition d'un mariage arrangé alors que j'étais en cours d'études universitaires typiquement.
[00:02:43] Speaker B: C'est-à-dire ?
[00:02:45] Speaker A: Typiquement, quand j'ai validé mes diplômes, la première réaction de mes parents, c'est bon, on va te marier. Ce que je ne voulais absolument pas. Ce n'était pas ce que je voulais. Je voulais continuer mes études.
[00:03:02] Speaker B: Concrètement, tu as validé tes diplômes, tu.
[00:03:07] Speaker A: Avais quel âge ? J'avais 24 ans.
[00:03:07] Speaker B: Et tu étais où ? À Paris ?
[00:03:10] Speaker A: Oui, tout à fait. En fait, j'ai grandi précisément à la Courneuve, dans le 93. J'ai grandi dans une cité en 93. J'étais scolaire, je sortais peu. Mes parents...
avait gardé un peu la mentalité du pays, c'est-à-dire qu'ils avaient une culture très marocaine finalement, moins européenne, je dirais, plus traditionnelle. J'ai grandi vraiment dans un contexte très traditionnel.
[00:03:42] Speaker B: Et toi, petite fille à la Courneuve, tu te sentais faire partie de cette culture marocaine ? Tu étais plutôt européenne ?
[00:03:49] Speaker A: En fait, ce qui est marrant, c'est que je ne savais pas trop. C'est compliqué, c'est difficile parce que, en tout cas, j'aspirais à une vie libre, à ma propre vie.
Et je savais que la clé était l'éducation. La clé était l'école. Je me suis raccrochée à l'école. C'était pour moi salvateur. C'était vraiment ma bouée de sauvetage pour pouvoir prendre ma voie, ma propre voie.
[00:04:12] Speaker B: C'était un petit peu ce qui te servait de hobby aussi, l'école, de passe-temps, tu dirais, ou tu avais d'autres...
[00:04:18] Speaker A: Alors, quand j'étais jeune, j'en avais pas trop de passe-temps, effectivement. J'ai commencé tardivement, il a fallu que je bouge des murs. Mon père, oui, il avait accepté que je fasse de la danse vers 16 ans, quand j'avais à peine 16 ans, donc il avait accepté, donc j'ai commencé à prendre des cours de danse à 16 ans.
J'ai continué depuis, j'étais pas même prof de danse quelques années plus tard. Donc, on va dire, mes parents, ils sont jamais fermés à ce que je fasse des choses qui me rendent heureuse. C'était pas ça. Par contre, ils se faisaient rattraper par le côté traditionnel du pays, le regard des autres. Et ça, c'était difficile pour eux. Du coup, c'était difficile pour eux à gérer. Et finalement, je le subissais indirectement.
[00:05:07] Speaker B: Et tes frères le subessaient de la même manière ?
[00:05:09] Speaker A: Non, c'est toujours inégal. Malheureusement, on a toujours... Un garçon, une fille, c'est pas pareil. Dans les familles, comme ça, c'est clairement... La fille apporte plus le fardeau, je dirais, que le garçon. C'est rarement... On n'arrange pas des mariages à des garçons, c'est rarement le cas.
[00:05:24] Speaker B: Et concrètement, donc, par les mariages arrangés, quand on est adolescence, d'abord, quand on grandit, concrètement, ça se manifeste par plus de responsabilités ou...
[00:05:37] Speaker A: Une peur aussi, une peur assez forte vis-à-vis du mariage, tout simplement. Moi, j'avais une antis, je ne voulais pas me marier. Clairement, je ne voulais pas du tout me marier, j'étais contre le mariage. Donc, oui, ça fait l'effet inverse.
[00:05:54] Speaker B: Tu parles de tes aspirations de liberté quand t'étais enfant. Pour toi, le mariage, ça faisait partie C'était la contrainte qui allait t'empêcher de faire ta vie.
[00:06:03] Speaker A: Ah oui, potentiellement. En tout cas, avec quelqu'un que je choisirais pas.
[00:06:06] Speaker B: Parce qu'aujourd'hui, tu es mariée.
[00:06:08] Speaker A: Oui, alors quelqu'un que j'ai choisi. C'est différent.
[00:06:11] Speaker B: Et donc, ça se passe comment à ce moment-là, où tes parents décident de te marier ? Tu es où à ce moment-là ?
[00:06:17] Speaker A: Alors, il y a eu deux tentatives. Une première fois, effectivement, j'avais mon bac en poche et je vois débarquer un cousin du pays. Et oui, c'était une période tragique pour moi. Ça a duré trois mois. J'étais vraiment pas bien dans mes chaussures. J'ai même pensé au suicide. J'étais vraiment pas bien.
[00:06:37] Speaker B: C'est-à-dire que pour ceux et celles qui nous écoutent, qui ne savent pas vraiment comment ça se passe, tu dis il y a un cousin qui arrive et qui s'installe à la maison ?
[00:06:45] Speaker A: Oui c'est ça exactement, et qui te colle, qui te suit où tu vas.
[00:06:49] Speaker B: Où que tu ailles. Et toi tu as 18 ans ?
[00:06:51] Speaker A: Oui c'est ça à peine.
[00:06:52] Speaker B: Et tu dois dire oui ou non à un moment ?
[00:06:56] Speaker A: Bah en fait, moi je disais clairement non, mais on te lave le cerveau, et tu trouveras personne d'autre, mais c'est la bonne personne pour toi, etc. C'est proche de l'arsenal moral quelque part. Donc, heureusement que j'avais une superbe amie à côté qui m'a permis de tenir le cap et de résister.
Et j'ai pu résister, et j'ai pu continuer mes études, juste par la suite.
[00:07:22] Speaker B: Finalement, tu as réussi à convaincre ton environnement que tu voulais continuer à faire ta vie. Qu'est-ce que tu prends comme direction ?
[00:07:29] Speaker A: Alors, je décide de continuer mes études dans les sciences. J'adorais les maths, l'informatique, la physique. J'avoue, je pouvais faire aussi les lettres, mais j'ai jeté mon dévolu sur les sciences. Je suis partie à Paris 6, en Pierre et Marie Curie, à l'université. Alors, ce qui était un peu frustrant pour moi, c'était qu'en terminale, effectivement, j'avais déposé des dossiers pour des classes préparatoires. J'avais été admise, j'étais admissible. Sauf que j'étais demandé conseil à des personnes qui avaient fait des écoles d'ingénieurs, des garçons, notamment un que j'avais pour référence, en fait, dans mon environnement familial, entourage, en tout cas. Et sa première réaction a été de me dire, oui, mais de toute façon, t'es une fille, t'as tellement de choses à faire à la maison comme Corvée que t'auras jamais le temps de t'occuper d'aller en classe préparatoire. Et le pire, c'est que je l'ai cru.
[00:08:17] Speaker B: Et à ce moment-là, tu l'as cru, tu t'es dit c'est un bon conseil.
[00:08:20] Speaker A: C'est un bon conseil, mais surtout pas. Donc aux jeunes filles, quand vous avez des avis comme ça, aussi tranchés, en tout cas, faites le tour de plusieurs avis neutres et pas familiaux. Allez chercher un autre avis. Neutre, pas forcément familiaux, parce que derrière, c'est clairement le mauvais choix.
[00:08:39] Speaker B: Et donc toi qui étais passé par cette envie de liberté, ce refus du mariage arrangé déjà, quand on t'a dit ouais mais t'auras trop de tâches ménagères à faire à la maison, tu pourras pas aller en classe prépa, tu l'acceptes.
[00:08:53] Speaker A: À ce moment là ? Je l'acceptais et j'ai fait le pari d'aller à la fac. Alors je me suis dit, bon, c'est le même programme quand on ne classe pas. Et a priori, c'est moins stressant, c'est ce qu'on m'a tous dit, plus ou moins, mais sauf qu'on ne m'a pas dit qu'on serait en toute autonomie. Et donc, il faut quand même gérer son autonomie quand on sort du lycée. Ça, c'est aussi une autre épreuve.
[00:09:15] Speaker B: Si cet extrait vous a donné envie d'en entendre plus, l'épisode complet vous attend sur toutes les plateformes de podcast et sur YouTube.